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Recherche amnésie désespérément | Lohen [CLOS]

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Lun 5 Fév 2018 - 23:50
Auparavant...

Les yeux clairs de Sigrid se posaient sans ambages sur le médecin qui était revenu vers elle. Son visage n'était probablement qu'un reflet du sien, les traces de sang séché en moins. Il avait l'air épuisé, lui aussi. Sauf que lui, ce genre de chose, c'était son quotidien, et c'était peut-être le plus triste. La jeune femme se souvenait de la fatigue constante. De l'épuisement nerveux qui venait lorsqu'on travaillait aux urgences. Des nuits, des week-end de garde... Dire qu'il avait encore à coeur de venir s'assurer qu'elle allait bien. La rassurer.

Elle fit un mouvement de bras et une moue qui se voulait désinvolte, mais qui ressemblait finalement à un masque grimaçant.


- Vous auriez réussi tout autant sans moi. Vous avez ça dans le sang.

L'agent Andersson en était persuadée. Il y avait dans l'attitude du Dr Emerson quelque chose qui laissait penser qu'il était habitué à travailler dans un climat de stress constant. Au delà de celui provoqué par les urgences d'un hôpital en manque de fonds. En fait, et ce n'était pas la première fois qu'elle pensait ça, il paraissait habitué à travailler dans le danger. C'était leur première rencontre, à vrai dire, qui lui avait donné cette impression. N'importe quel urgentiste, fut-il bon, n'aurait pas géré l'intrusion de deux gangs mafieux au sein de son service avec autant de professionnalisme. Et ce moment passé à travailler à ses côtés en situation de crise n'avait fait que conforter ce sentiment, tout comme son attitude présente.
Matthew Emerson avait tout du médecin humanitaire. Le genre de type qu'ils auraient aimé avoir sur place, dans l'Arche Bolivienne, au moment des tremblements de terre.

La Scandinave détourna son regard de son interlocuteur, le laissant se perdre dans le blanc des murs. Mais bien vite, elle cherchait autre chose. Le blanc laissait bien trop de possibilité aux images qui attendaient dans son esprit de venir s'imprimer de nouveau sur sa rétine.
Le vide était dangereux.
Ne rien faire était dangereux.
Penser était dangereux.

La rouquine se redressa à moitié. Il faudrait bien qu'elle rentre, et peut-être qu'il était temps. Matthew avait d'autres choses à faire, d'autres personnes à voir. Elle n'était pas, ne devait pas devenir son problème. Mais avant qu'elle n'ait pu ouvrir la bouche pour lui dire au revoir, il l'invitait à la suivre. Prendre une douche, rien que l'idée était apaisante. Se débarrasser des vestiges d'être humains qui souillaient actuellement sa peau avait des airs de paradis.

Elle le suivit, silencieuse. Se demandant au final ce qui poussait quelqu'un à tant de gentillesse. Ils remontèrent des couloirs qui, il n'y a finalement pas si longtemps, résonnaient encore de coups de feux et de hurlements de douleurs. Fugacement, la flic se dit qu'elle avait un don pour se mettre dans des situations compliquées. Il lui indiqua les douches, annonçant qu'il allait lui trouver de quoi se changer. Pas un luxe. Il y avait une chance non négligeable que Sigrid brûle les vêtements qu'elle portait actuellement, tentative désespérée pour s'exorciser. Maintenant que le calme était revenu, il lui semblait qu'ils lui brûlaient la peau. Alors si on lui offrait la possibilité de ne pas avoir à les porter plus longtemps...

Lorsque Matthew quitta la pièce, elle délaissa ses vêtements souillés au sol, dans une flaque de tissu noir et sang sur blanc aseptisé. Gardant uniquement ses sous-vêtements, elle plia rapidement le tout, soucieuse de ne pas mettre de désordre dans un endroit qui ne lui appartenait pas. L'ordre, elle s'y raccrochait un peu désespérément. Pour se concentrer sur tout sauf sur ce qui voulait sortir de sa tête. Pénétrant dans la cabine, elle alluma le jet d'eau, se délesta des dernières pièces de tissus qui couvrait encore son corps et frissonna en posant son pied nu sur le carrelage encore froid. L'eau était brûlante, mais pas encore assez pour faire oublier à sa peau la sensation poisseuse sur son visage.

Elle se lava frénétiquement. Puis, lorsqu'elle eut finit, elle se mit à pleurer. Convulsivement. Les sanglots qu'elle retenait depuis trop longtemps s'échappait sans aucune retenue maintenant qu'elle était seule. Les nerfs lâchaient d'avoir été forcés au calme si longtemps. Elle pleura sur la violence, la mort, l'injustice, sur son impuissance. Elle pleura pour cette femme qu'elle ne connaissait pas mais qu'elle n'oublierait probablement jamais.

Quand enfin elle fut calmée, elle s'enroula dans la serviette rêche mise à sa disposition. Face au miroir, elle s'appliqua à faire disparaître toute trace de sa faiblesse précédente, du mieux qu'elle pouvait. Mais là, dans cette pièce aseptisée, ses cheveux détrempés masquant son visage, ses yeux bleus rougis par les larmes, et le souvenir de cette journée comme une ombre gigantesque, elle se trouvait pathétique.

La Scandinave attacha ses mèches flamboyantes en un semblant de chignon et se rhabilla rapidement, passant une robe légère à fleurs. Tout à fait typique de la saison, nettement moins de ce qu'elle portait habituellement, et qui détonnait assez avec ses baskets de cuir noir. Qu'importe. Elle ne se préparait pas pour un défilé de mode.

Elle finit par sortir des vestiaires, ses vêtements dans un sac plastique que le médecin avait eu la bonne idée de lui fournir. Demandant à une infirmière ou était le Dr Emerson, elle finit par le retrouver aux urgences, occupé. Un vague sourire passa sur ses lèvres, presque amusé. Elle ne s'attendait pas à le trouver ailleurs. A peine eut-elle le temps de le rejoindre qu'il lui jeta un regard interrogatif, auquel elle répondit d'un sourire qui se voulait rassurant, mais qui était malheureusement démenti par ses yeux encore un peu rouge pour qui avait l'oeil.


- Je... merci pour la douche. Et les vêtements.

Elle se sentait maladroite. Dans ses paroles, dans ses gestes. Comme si elle avait même oublié comment faire pour se tenir normalement, se conduire normalement. Le médecin, après avoir hésité, finit par lui proposer d'aller boire un verre non loin. Un moyen de se calmer, tous les deux, elle le savait parfaitement. Et maintenant qu'elle était propre, elle n'était plus si pressée de retrouver la solitude et le silence de son appartement. Elle n'hésita qu'une seconde.


- D'accord.

Elle le laissa les guider tous les deux.
Une bière, pourquoi pas. Peut-être qu'elle n'aurait plus si peur de rentrer chez elle et des images qui allait l'assaillir, après ça. Peut-être. Elle en doutait. Mais en cet instant, elle voulait y croire.
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Ven 9 Mar 2018 - 18:00
En vérité, le docteur Emerson ne s'était pas vraiment attendu à une réponse positive de la part de l'agent de New Scotland Yard. S'il fallait encore être tout à fait honnête, il ne savait pas même quelles raisons l'avait poussé à formuler sa demande. Bien entendu, il en avait eu l'envie -ce qui, en règle générale, devait être une raison suffisante pour pousser quelqu'un à faire quelque chose. Cependant, lorsqu'il s'agissait des envies du jeune urgentiste, la raison et les obligations prenaient le pas sur les désirs. Alors qu'est-ce qui avait bien pu se passer dans son esprit pour qu'il cède sans même réfléchir, à la formulation de la question fatidique -mais néanmoins sans conséquence, reconnaissons le. La réponse apportée par la flic ne l'a menait pas à regretter, bien au contraire, il ne pouvait qu'apprécier partager une bière en agréable compagnie, surtout dans ce genre de circonstances. Rester seul en face à face avec le souvenir de ce qu'ils avaient vécu n'était jamais vraiment très bon ni pour le moral, ni pour leur santé mentale.
Mais en réalité, Lohen se sentait à présent un peu stupide. Peut-être s'était-il trop imaginer le refus poli qu'elle allait lui servir ; l'excuse d'un poisson rouge à aller nourrir (ou même un.e conjoint.e!). Et déjà il s'était vu, comme d'autre soirs -ou matin- au bar, devant une ou deux pinte de cette excellente bière artisanale, à jeter un coup d'œil distrait aux nouvelles diffusées en boucles sur l'écran muet derrière le comptoir. Il aurait fini par converser avec Connor, le barman, au sujet de ce qu'ils regardaient d'un œil un peu désabusé, ils auraient échangé leur point de vue politique et societale, qui se rejoignaient souvent, avant de divaguer sur la famille. Il aurait pris des nouvelles de son mari et de leur fille avant de payer la note agrémenté d'un pourboire, avant de rentrer chez lui en taxi.

De fait, cette perspective bien rodée était chamboulée. Pour le mieux, il fallait le reconnaître et une agréable surprise passa sur les traits de son visage épuisé. Il esquisse un sourire fatigué mais sincère.

- Bien. Donnez moi cinq minutes. Lui demanda-t-il.

Le temps de finir ce qu'il avait à faire, prévenir ses collègues et se défaire de la blouse blanche qu'il avait passé à la hâte.

Bientôt, le duo passaient la porte des urgences pour laisser derrière eux cette foutue journée.

L'urgentiste avait poussé la porte du bar qui faisait l'angle de l'avenue, en face de l'hôpital. L'établissement avait tout du café de quartier, modeste et sans prétention, avec ses habitués ; surtout des internes épuisés et des habitants discrets.
Lohen avait invité la flic à entrer avant de la suivre à l'intérieur. Il salua le barman d'un signe de tête et proposa à la jeune femme une table haute assortie de tabourets

- Ça vous va ? S'enquit-il, préférant, pour une fois, la salle au comptoir.
Il se mit à l'aise avant de reprendre :

- Vous savez, ce que vous avez dit tout à l'heure ? La question était un peu formulée à brûle pourpoint. Que j'aurais très bien pu faire la même chose si vous n'aviez pas été là ? Précisa-t-il pour remettre un peu les choses dans leur contexte. Je n'en suis pas aussi sûr que vous. Affirma-t-il avec un air qui lui était si caractéristique.

Ses yeux pétillaient d'une douce malice là où son sourire avait quelque chose de maladroit, presque gêné.

- Être entouré de personnes efficaces est crucial. Assura-t-il. Et vous avez été parfaite.

Sans trop s'avancer, il avait clairement l'impression qu'ils formaient une bonne équipe médecin/flic/infirmière/gardienne/assistante. Et la jeune recrue portait toutes les casquettes, en plus d'être volontaire et débrouillarde. Le chef des internes devait également reconnaître qu'il aimait la façon dont le courant passait entre eux. Professionnellement, bien sûr, se sentit-il l'obligation de préciser mentalement.

À leur table, le barman avait déposé deux pintes de bière fraîchement tirée du fût. Emerson prit son verre pour le lever en direction de la jeune femme à la chevelure incandescente.

- À cette folle journée.

Il but une gorgée avec délectation, fermant les yeux de plaisir. Le poids de cette intervention imprévue semblait déjà libérer un peu ses épaules tendues. Le breuvage était amer et malté comme il l'aimait. Il avait suffisamment de bouteille pour réussir à reléguer sans trop de peur le sang et l'horreur dans un coin de son esprit. Il tentait de ne pas devenir insensible pour autant, mais il avait vu tout un tas de choses dans sa pourtant jeune expérience, les missions humanitaires n'avaient rien de comparable à la vie de l'arche, et il ne pouvait clairement pas se laisser submergé par ces choses. Encore une fois, il en allait de sa propre santé.

Il hésita un instant, l'humeur un peu plus sombre.

- C'était la première fois que vous vous trouviez confronté à ce genre d'événement ? Interrogea l'urgentiste en faisait référence plus spécifiquement aux prodiges kamikazes.
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Dim 8 Avr 2018 - 20:43
Un instant, elle avait cru que le Dr Emerson allait se rétracter. Qu'il se souviendrait d'un rendez-vous important, ou éclaterais de rire quand elle offrirait une réponse positive.
À vrai dire, en temps normal il y avait fort à parier que Sigrid aurait elle-même poliment décliné. Elle ne prenait pas de verre avec des inconnus, qu'importe qu'ils aient ce sourire ou ces yeux. Elle ne prenait pas de verre avec qui que ce soit, d'ailleurs, c'était à peine si elle sortait avec ses collègues du temps de l'hôpital, c'était dire.

Mais aujourd'hui, la Scandinave avait vu des choses qui dépassaient l'entendement humain. Alors peut-être que, rien que pour ce soir, elle pouvait se permettre d'être un peu humaine, un tout petit peu. Elle lut la surprise dans les yeux du jeune homme. Aurait-il préféré qu'elle refuse? Son sourire semblait dire le contraire... mais la rouquine s'interdisait généralement de lire dans les pensées, analyser les expressions des visages qui n'étaient pas ceux d'un suspect. Elle trouvait ce jeu trop dangereux, dans sa vie privée.

Il lui demanda 5 minutes, qu'elle lui accorda avec un léger sourire poli.
Son sac platisque à la main, elle s'adossa au mur, ses yeux clairs se perdant dans la contemplation du motif fleuri qui parait le tissu de sa robe. Et lorsqu'il revint, elle le suivit sans un mot, repoussant d'une main fine une mèche vagabonde, qui séchait en bouclant à sa guise.
La flic se demanda un moment ce qui avait poussé son collègue improvisé à lui proposer ce verre, à elle.
Elle n'avait pas spécialement l'impression d'être de bonne compagnie, bien qu'elle-même ait apprécié la sienne. Travailler avec lui, s'empressa-t-elle de corriger intérieurement pour son subconscient.

Ils pénétrèrent dans le bar, qui avait effectivement tout du repère d'hôpital. Sans doute était-ce une règle ressemblait-il a tous les autres pubs du monde, mais Sigrid associait l'endroit au bar ou elle et ses quelques collègues infirmières, internes, médecins, allaient parfois traîner après de longues journées. Elle y prenait une bière et se contentait la plupart du temps de boire en silence, mais écoutant avec intérêts critiques, commérages et autres nouvelles. Chaque centre hospitalier devait avoir le sien.

Elle acquiesça, avec un petit sourire.


- C'est très bien.

Un peu égoïstement, la jeune femme choisit le siège qui faisait dos au téléviseur et s'y percha souplement, comme un chat.
Et, comme un chat, elle ne put s'empêcher de l'observer alors que lui aussi s'asseyait. Ses yeux se détournèrent rapidement alors qu'il complimentait son efficacité. Elle se savait efficace sous la pression. Tant le milieu médical que policier avait ce genre d'effet sur les gens prêts à s'investir. Alors aiguillé par quelqu'un d'aussi efficace, cela ne pouvait que fonctionner. Mais le savoir et l'entendre, ça n'était pas la même chose.

Elle releva les yeux, juste à temps pour croiser les siens. Une seconde durant, deux peut-être, elle le regarda sans répondre. Analysant la maladresse de son sourire et l'étincelle de ses yeux. Puis, ses lèvres s'étirèrent en un sourire doux, chargé d'une forme de... reconnaissance.


- Merci. J'avais de bonnes directives.

Une fois encore, son ancien métier et le nouveau se ressemblaient : pour parvenir à quelque chose lorsque l'on occupe le poste d'agent ou d'infirmière, il faut quelqu'un qui prenne les décisions aux bons moments. Peu importait l'efficacité d'une équipe si à sa tête trônait un incapable... ce que n'était assurément pas le Dr Emerson.

Elle leva à son tour son verre, et, bien plus cynique, reprit :

- Au fait d'être en vie.

Il étaient nombreux à ne pas avoir cette chance.

Elle but à son tour. Elle se surprit à sentir l'amertume sur sa langue, elle qui se croyait parfaitement engourdie, presque anesthésiée. S'accordant quelques instant de réflexion, elle finit par répondre :


- J'ai déjà connu... des situations tragiques. Étant infirmière aux urgences, j'ai vu des accidents de la routes, des agressions, une explosion de gaz dans une usine. Mais ça n'est pas la même chose. Je soignais les corps meutris. Je n'avais jamais vu... le moment T, la cause des blessures.

Elle secoue la tête, et son chignon fait à la va vite s'écroule, répandant ses mèches encore humides sur ses épaules dénudées. La rouquine passe la main dans ses cheveux, y repéchant l'élastique qui avait failli à sa tâche. Elle joue machinalement avec, reprenant calmement:

- Il y a une sorte de distance, quand on porte une tenue d'hôpital. Elle n'existe pas quand on à l'uniforme du flic.

Elle avait l'impression frustrante de ne pas parvenir à mettre les bons mots sur son ressenti. Qu'importe, au final. Ses yeux, qui avaient dérivé vers le vague et le vide, retrouvèrent le regard du médecin.


- Mais pour répondre à votre question... sous cette forme, non, jamais.

Sans doute était-ce pour cela que son cerveau ne parvenait pas à se débarrasser des images terrifiantes. Mais, ça, elle ne voulait pas s'y confronter, pas encore. Jamais, peut-être. Elle sonda son vis-à-vis.

- Vous, vous aviez déjà... vu ça. Non?

Soit ça, soit il avait vraiment des nerfs d'acier.
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Jeu 10 Mai 2018 - 18:12
La laissant s'installer là où elle le voulait, le docteur Emerson observait du coin de la jeune femme qui s’asseyait avec aisance sur un siège haut.
Il était soulagé de constater que la gène passagère s'était un peu dissipée. La fatigue et les nerfs mis à rude épreuve étaient largement suffisant pour balayer les appréhensions qu'avait pu suscité l'invitation. Non, il ne regrettait pas. Il n'avait pas la moindre envie de boire seul. De rentrer retrouver ses filles, à qui il ne pourrait jamais raconter ce qu'il avait vécu, de croiser Marta, qui s'inquiéterait de savoir ce qui s'était passé, il ne voulait pas non plus croiser son père... ah non, alors lui c'était le pompon... Il ne voulait pas coucher les filles comme si de rien était et retrouver la solitude du plafond blanc de sa chambre, sans fermer l’œil de la nuit.
Il prendrait probablement rendez-vous avec son psy dans les jours à venir. Mais outre le fait que son praticien était bon et beaucoup sollicité -il lui faudrait peut-être plusieurs jours voire semaines avant d’obtenir un rendez-vous- il était également First Man et son mari avait de peu échappé à la mort aujourd'hui, il prendrait donc peut-être quelques jours de congés.
Cependant, il n'avait pas invité Sigrid pour lui parler comme à son psy mais bien pour se changer les idées. Lui changer les idées. Sinon lui faire oublier ce qu'elle avait vu, au moins faire se dissiper un peu les images probablement encore collé sur sa rétine.

Il la revoyait, couverte de sang, légèrement blême, rejoindre le stand d'Arkadia. Il avait immédiatement compris ce qu'elle avait vécu. S'il vivait en ce moment même ne serait-ce qu'un dixième de ce qu'elle avait vécu, alors.. alors peut-être qu'il pourrait la soulager d'un dixième des souvenirs qui la hantaient.
Une pensée s'égara lorsqu'il se demanda si elle avait quelqu'un a retrouver chez elle. Un petit copain, ou copine, qu'elle cherchait à protéger en ne lui rapportant pas les horreurs du salon. Ou si, comme lui, elle se retrouverait seule avec ses souvenir brûlants.

Leur regards se croisèrent dans un silence et Matthew se sentait encore plus mal-à-l'aise, il souriait, prenant sa réponse comme un compliment. La jeune femme avait une détermination, une force dans le regard, elle semblait savoir où elle allait, ce qu'elle voulait. Elle avait beaucoup de charme, et peut-être, peut-être qu'en d'autres circonstances, dans une autre vie, il aurait pu la trouver séduisante. Pas qu'elle ne l'était pas, mais seulement le jeune père ne s'autorisait plus à réfléchir de cette façon.

Le cynisme grinçant de la flic lui tira une grimace accompagné d'un hochement positif du chef. Il ne pouvait que la rejoindre sur ça.

Il bu une nouvelle gorgée en l'écoutant répondre à sa question. Il opinait du chef pour lui faire entendre qu'il comprenait parfaitement ce qu'elle voulait dire.
Ses cheveux tombèrent en cascade autour de son visage, telle une vague enflammée. Matthew dissimula un sourire avant de chercher quelque chose dans ses poches. Il fouilla sa veste, les poches arrières de son jean pour trouver enfin ce qu'il cherchait. Il tendit à la gardienne de la paix un élastique bleu à paillette. Il cru bon de préciser :

-L'avantage d'avoir deux têtes blondes à la maison. Vous les avez aperçue plus tôt.

Lorsqu'elle reprit, sa voie était posée. Il comprenait ce qu'elle voulait dire :

-Oui, j'imagine que nous sommes davantage protégés de là où nous sommes, admit-il alors qu'il avait conscience qu'en dépit de tout ce qu'ils pouvaient voir entre les murs de l’hôpital, ça n'était rien en comparaison de ce qui pouvait être le terrain.

Il hocha doucement la tête, alors qu'elle lui révélait que c'était la première fois.

-Sur l'arche albanaise. Pendant la guerre civil de 2013. La situation humanitaire là-bas est catastrophique depuis plus de vingts ans. J'ai eu l'occasion de prendre un congé sabbatique de deux mois pour partir là-bas avec une ONG lorsque le conflit a éclaté. La première fois, l’hôpital dans lequel je travaillais a été bombardé, l'assistante locale du bloc op' a été soufflée sous mes yeux... la seconde... On était de sortie. On partait souvent avec des ambulances sur les lieux d'attentat à la bombe. La première avait détruit une ambassade. Je me souviens être descendu de l'ambulance, courir vers les premiers blessés, c'était une rue passante, j'ai pas eu le temps de faire trois pas qu'une seconde bombe a explosé à quelques mètres. Le chauffeur est mort sur le coup, un collègue s'est trouvé amputé des deux jambes. Dans les deux cas, ne n'ai pas la moindre idée de comment je m'en suis sorti.

Emerson redevint muet. En dépit de la facilité qu'il avait maintenant à raconter les moments les plus éprouvant de sa vie, il les revivait exactement comme au premier jour. Sans que l'image ni la mémoire ne se ternissent. Il avait apprit à vivre avec, même si jamais elles ne disparaîtraient.

Je ne peux malheureusement pas vous dire que ça partira. Ce qui tourne en boucle dans votre tête en ce moment. Il soutenait le regard de la rouquine. Pas dans une forme de défi, bien au contraire, mais pour lui montrer qu'il la comprenait, plus qu'elle ne pouvait l'imaginer et qu'il voulait lui transmettre tout ce qu'elle aurait besoin de courage pour retrouver la paix.Mais, de jours en jours, ça deviendra moins présent, et ça ne fera plus que vous réveiller en sursaut de temps en temps la nuit....

Matthew se mordit la lèvre.

-Je suis désolé. Il secoua la tête de dépit à sa maladresse. Je ne voulais pas dire ça comme ça. Il levait les yeux au plafond pour se morigéner de sa propre bêtise. Je ne sais pas vraiment comment m'y prendre. Il fixa alors son regard sur sa bière. Vous m'avez tout l'air d'une jeune femme solide, et vous en verrez d'autres... Vous avez choisi ce job, parce que vous êtes capable d'encaisser. Ça se sent.

Tout le monde n'avait pas les épaules pour faire ce que Red faisait. Elle avait, par deux choix, choisi des carrières qui nécessitait une volonté de fer, des nerfs d'aciers et une détermination sans faille.
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Mar 5 Juin 2018 - 2:08
Ils gardèrent le silence un moment. Mais pas comme s'ils n'avaient rien à se dire, non. Plutôt comme s'il y avait trop à évoquer. Trop gros. Elle eut un bref rire lorsqu'il lui tendit un élastique pour ses cheveux, et s'en empara, délaissant le cadavre étiré, brisé, de son prédécesseur sur la table.

- Merci.

Ses mains fines se glissèrent dans sa chevelures, et la ramassèrent en un nouveau chignon. Pas une queue de cheval. La queue de cheval, c'était pour le travail. Sigrid était une femme d'habitude, de rituels. Cela lui permettait de passer chaque jour et d'avancer au prochain. Et là, elle ne voulait surtout plus se sentir au travail. Ceci dit, la robe dont elle était vêtue la transportait déjà bien loin de l'univers routinier auquel elle était habituée. La rouquine ne portait plus de robes, ou presque, depuis son départ de l'Arche Scandinave.

- Je suis sincèrement désolée de les avoir effrayer. Je ne...Je n'avais pas pensé au fait qu'elles pourraient être présentes. Surtout sur le stand d'Arkadia.

A vrai dire, elle n'était même pas certaine du pourquoi de la présence du médecin là-bas. Il y avait tant de raisons possibles... Et elle ne se sentait pas la légitimité de fouiller dans sa vie privée. Ni même d'oser lui poser la question, à vrai dire.

Son doigt effleura le verre où se formait quelques gouttes de condensation. Et ses yeux trop bleus remontèrent jusqu'à ceux du jeune père lorsqu'il lui livrait, de lui-même, un pan de son histoire. Deux bombes. Deux morts. Et il avait survécu. Miss Andersson ne croyait pas au destin. Ou plutôt, ne voulait pas y croire. C'était trop simple. Mais parfois, le monde se chargeait de lui montrer qu'elle avait peut-être tort. Et lorsqu'elle répondit, simplement, sa voix était plutôt assurée.


- Vous aviez deux petites filles.

C'était probablement amplement suffisant pour que, s'il y avait réellement quelqu'un quelque part qui tirait les ficelles, il ou elle ait eu pitié. A vrai dire, Sigrid ne voyait pas de meilleure raisons. Le monde était vache, dur et sanglant. Mais parfois, il sauvait un père de famille pour que ses gamines ne finissent pas orphelines. Est-ce que ça contrebalançait? Probablement pas. Mais ça aidait à se dire que finalement, tout n'était pas si noir. Et quand vint le sujet des images qu'elle avait vues, et qui resteraient dans sa tête sans jamais en sortir, elle eut une moue, à mi-chemin entre la grimace et le sourire résignée. Il avait l'air de savoir de quoi il parlait. Plutôt logique, vu ce qu'il avait déjà vu.

- Ça rejoindra le reste. Je suppose qu'on apprends à vivre avec tout.

Elle était faussement désinvolte. Mais comment se décharger sur cet homme, qui avait sa part de fantômes, qu'elle ne connaissait que peu et qui étaient loin d'être son psy -tant mieux pour lui? La jeune femme avait trop de réserve, et, d'une certaine manière, trop de respect pour lui. Elle aurait voulu poser une main sur la sienne. C'était ce qu'on faisait dans ce genre de situations, non? Dans les films en tout cas. A vrai dire, dans les films, c'était dans ces moments-là que les protagonistes tombaient amoureux. Mais si la vie de Sigrid Andersson était un film, ça n'était certainement pas une comédie romantique. Plutôt un vieux Scandinavian Noir, sombre et torturé. Et dans ce genre de film, il n'y avait pas de place pour l'amour. Tout début de sentiments, voire de relation, étouffait bien vite faute d'oxygène à partager. Il y en avait déjà si peu pour le personnage principal, qui passait son temps à chercher une bouffée d'air...

- Ne vous excusez pas. Vous êtes honnête. Et je préfère ça à quelqu'un qui me soutiendra qu'un jour, j'oublierais, et dont je saurais qu'il ment.

Parce qu'on oubliait jamais rien que les détails sans importance. Elle but une gorgée de bière, et eut un sourire, un vrai. Même s'il n'était pas bien grand. Elle appréciait ce type. Qu'il ait pris un peu de temps pour elle mais aussi pour lui. Cela montrait de la sagesse : celle de connaître ses faiblesses. De savoir quand il était impossible de faire semblant... Et quand, du coup, se ménager une pause pour épargner sa famille, aussi.Il y eut un petit silence, et la flic rebondit sur sa dernière phrase.

- En fait, si j'ai choisi ce job, c'est parce que ma mère est décédée. Ça fera quatre ans en décembre

Elle eut un petit sourire presque désinvolte et haussa les épaules, les yeux fixés sur le bois de la table. L'air de dire que tout ça, c'était du passé. Son sourire s'accrocha à ses lèvres juste une seconde de trop. C'était le genre de sourire qui ne  voulait strictement rien dire à part... A part "ma mère est morte, et toutes les décisions que j'ai prises depuis ont été dictées par cet évènement". A part "Je ne me suis pas remise de sa disparition, et j'ai préféré fuir plutôt que vivre avec son fantôme". A part "Je me cache derrière des sourire pour éviter de montrer que je suis foncièrement malheureuse. Parce que ma douleur ne vaut rien". Trois fois rien. Elle reprit, d'une voix presque naturelle. Elle l'avait travaillée, cette voix. Tout pour éviter qu'on la plaigne. Ou pire, qu'on transperce sa carapace.

- Le flic qui s'est chargé de l'affaire l'a classé rapidement. Sa faute, selon lui. Rentrer seule à pied dans Stockholm en robe en plein hiver, c'est semble-t-il un appel aux agressions.

L'amertume. Plus uniquement celle de la bière, dont elle reprit une gorgée. Elle ne savait pas pourquoi elle lui avait dit ça. Elle l'avait caché à presque tout le monde. Ses collègues... ses amies. Enfin, aux deux qu'elle avait. Les morts violentes de ses deux parents étaient noyées dans tout ce que la Scandinave gardait pour elle. Sa date d'anniversaire. Sa couleur préférée. La musique qu'elle écoutait, le soir, en rentrant du boulot. Le fait qu'elle prenait des cours de piano depuis trois ans maintenant. Tout ce qui faisait d'elle un être humain, en somme, et qu'elle gardait bien caché au fond d'elle depuis... si longtemps que s'en était devenu naturel.
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Ven 6 Juil 2018 - 15:21
En dépit de la fatigue qui commençait sérieusement à tirer sur sa nuque et endolorir ses muscles, en dépit des images encore vives que les événement de la journée avaient laissé dans son esprit, un très fin sourire semblait vouloir persister à naître sur les lèvres du jeune médecin lorsque son regard croisait celui de la rouquine. Ses traits fatigués s'illuminaient alors d'une douceur sincère, presque timide et son œil brillait d'une lueur nouvelle et bienveillante. Il n'observait pas moins son interlocutrice avec une certaine réserve, une politesse dont il ne savait se détacher, à moins que ce ne soit, de façon parfaitement inconsciente, pour ne pas révéler l'attraction irrésistible que provoquaient le flamboiement de sa chevelure la profondeur azur de son regard.

Matthew secoua lentement la tête, tandis que ce sourire s'élargissait d'une douceur compréhensive et qu'elle lui présentait des excuses.

-Je vous en prie, ne vous excusez pas, vous ne pouviez pas savoir. Les circonstances ont fait qu’elles se trouvaient là mais vous avez fait ce que vous aviez à faire.

Le jeune père avait conscience que Sigrid ne disposait pas de toutes les informations qui lui auraient permis de comprendre la raison de leur présence sur le stand de l'organisation non-gouvernementale, et le détail de sa filiation n'était pas une information que le jeune père divulguait facilement, pourtant, il estimait également que miss Andersonn avait tout de même le droit à quelques explications, ou tout au moins un éclairage d'une partie de la situation. Aussi, les yeux rivés sur son verre, il ajouta avec un détachement qui sonnait un peu faux :

-Elles voulaient voir leur grand-père. Il releva très légèrement la tête, comme pour observer à la dérobée la réaction de son interlocutrice. Il ne voulait pas vraiment en dire plus, peut-être par peur de sa réaction. Cette appréhension était probablement sans fondement, mais il ne voulait pas que sa filiation puisse causer du tord à leur relation naissante. Elle comprendrait probablement ainsi le lien qu'il entretenait avec Perceval rose, tout en laissant sous-entendre la sensibilité du sujet.

Heureusement pour lui, la conversation se reporta bientôt sur les deux expériences qui avait marqué la vie de l'urgentiste. A y repenser, c'était presque incroyable, ce qui lui était arrivé. Cela défiait même toutes les probabilités. Pourtant, son sourire se fin un peu plus triste lorsque Sigrid lui faisait part de sa vision des choses qui laissaient entendre qu'en dépit de leur manque de croyance, il se pouvait qu'il y avait bien un certain ordre dans l'univers. Peut-être avait-elle raison. Lohen n'avait de toute façon pas eu d'autre choix que d'accepter, avec le temps, que les choses se déroulaient toujours comme elle devaient se dérouler et que l'on avait aucune emprise sur celles-ci, qu'elles soient douloureuses ou non, qu'on les veuille ou non.

Finalement, Lohen ne pu que hocher du chef en signe d'assentiment. Il fut pourtant pris un peu au dépourvu lorsque la jeune flic lui avoua les raisons de sa reconversion. Sa première réaction fut d'être touché par cette sincérité quant à ses motivations profondes et cette confiance qu'elle lui portait pour aborder un sujet aussi personnel. Elle essaya tout de même de donner le change avec un ton qui se voulait détaché, mais son sourire forcé et son regard fixe et déterminé sur un point était la preuve qu'il ne s'agissait que d'une façade. Matthew réprima une grimasse. Il lui semblait entre-apercevoir là une fragilité qu'il n'avait décelé auparavant chez la jeune femme. Une fêlure qui n'avait duré qu'une seconde, si fugace que Lohen s'était demandée s'il l'avait jamais surprise. La suite de son récit, révoltante, lui fit presque oublier ses doutes. Il serra les dents, incapable de croire qu'il existait encore de telles injustices, de façons de penser aussi révoltante.

-Je suis vraiment désolé. La sincérité avait du mal à se faire une place derrière la colère. L'injustice pouvait prendre plusieurs formes, cependant, elle était d'autant plus insoutenable lorsqu'elle émanait directement de l'être humain. Vous ne pourrez peut-être pas obtenir la justice pour votre mère, mais au moins pourrez vous l'apporter pour d'autres personnes vivant des situations similaires. C'est un bel engagement.

Matthew avait conscience de la banalité de ses paroles, pourtant, il y croyait. Comme il croyait aux vocations, peu importait comment elle vous était échue.
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Dim 22 Juil 2018 - 0:31
Leur Grand-père. Perceval Rose? Le détachement dans la voix de Matthew sonnait aussi juste que celui qu'elle prenait quand elle voulait éviter de s'étendre sur un sujet trop personnel. Elle connaissait cette inflexion de voix. Aussi elle ne poussa pas l'interrogatoire plus loin. Ce n'était de toute manière pas son genre. Sigrid considérait que sa vie privée ne regardait qu'elle. Alors, il était logique que celle des autres ne la regarde pas plus. Mais tout de même... Le Dr Emerson, fils de son second employeur. Et qui, semblait-il, avait une relation tendue avec lui...

Bah. Qu'importait. Elle y penserait plus tard. Pour le moment, ce n'était pas Perceval Rose qui important. Mais eux deux, cette bière, cette journée. Cette discussion qui lui faisait plus de bien qu'elle ne le montrait probablement. Parce que l'agent Andersson essayait, la plupart du temps, de masquer ses émotions. Mais elle ne pouvait pas s'empêcher de laisser sourdre de la reconnaissance dans sa voix, dans ces interactions avec cet homme. C'était idiot, peut-être. Mais elle appréciait sa compagnie. Et surtout, elle appréciait d'avoir pu revenir, même le temps d'une après-midi, dans l'univers médical qu'elle connaissait et qu'elle appréciait, pour l'assister. Cela l'avait aidé, d'une certaine manière, à surmonter les évènements de la journée.

Oh, ils reviendraient bien assez tôt. Et ils la hanteraient pendant de longs mois. Mais pour l'heure, ils étaient relégués en arrière-plan, comme le fond sonore vague de la télé qui tournait toujours, et ressassait probablement les images de cet avant-goût de l'apocalypse. La vie devait continuer. Peu importait la difficulté à se remettre dans un circuit habituel. C'était peut-être cette situation inhabituel, bizarre qui induisit la confidence que la flic fit au médecin. Ou peut-être, le fait que, sans véritables explications, elle faisait confiance à cet homme. Ou simplement la preuve que les secrets jamais ne durent. L'avoir avoué à quelqu'un, à quelqu'un qui ne l'avait pas appris en fouillant dans son passé, bien entendu, était presque un soulagement. Un minuscule rien, mais qui la faisait se sentir plus humaine que ces derniers temps.

Ce furent des mâchoires serrées qui accueillirent la nouvelle. Normal. Elle-même n'avait pas vraiment desserré les siennes depuis l'évènement. Elle hocha doucement la tête, acceptant la sincérité de son interlocuteur:


- Je ferais de mon mieux. Tant mieux si je peux... aider. Limiter le nombre de personnes qui auront à interagir à un homme de son genre.

Sigrid Andersson, de sa manière un peu étrange, aimait les gens. Elle aimait surtout les aider. Apaiser leur souffrance. La proximité lui était difficile, mais l'humanisme était présent. C'était, après tout, le principal. Le reste... elle s'en accomoderait. La jeune femme but la dernière gorgée de bière qui patientait au fond de son verre, et son regard accrocha une horloge, sur un mur. Elle n'était pas une princesse, même si elle vivait enfermée dans une tour d'ivoire. La différence résidait dans le fait que c'était elle sa propre geôlière. Elle qui possédait la clé. Elle qui décidait qu'il fallait rentrer, maintenant. Retourner à la réalité, puisqu'elle la rattraperait tôt ou tard, de toute manière.


- Je devrais rentrer. Je dois récupérer ma moto près de l'Exposition...

Une tâche qui lui semblait insurmontable. Mais il faudrait affronter les cris fantômes, et les souvenirs, à un moment donné. La vie devait continuer.

- Merci pour ce délai. J'en avais besoin.

La rouquine se leva, et arrangea les plis de sa robe, presque machinalement. Dans un geste qui montrait une certaine habitude, celle que l'on obtient quand on a fait et refait ces gestes pendant des années. Peu importait depuis combien de temps ils n'avaient pas été effectués, les gestes d'une ancienne habitude ne perdaient jamais tout à fait cette exactitude mécanique, ni cette impression qu'ils faisaient partie d'une personne. Mais Sigrid n'était plus la femme qui portait des couleurs vives, des robes légères, et qui riait la bouche fermée, comme par pudeur. Elle ne riait plus que trop rarement, désormais. Mais c'était ainsi.

Elle se pencha pour récupérer son sac et en tira un portefeuille assez fatigué et jeta un oeil sur la note que le barman avait déposé en même temps que les bières. Elle sortit un billet et quelques pièces, laissa un pourboire, et sourit à Matthew. D'un sourire sincère, qui voulait dire autant merci qu'à bientôt. Jetant son sac sur son épaule, elle se retourna, prête à partir. Mais une seconde à peine et elle se retournait vers le médecin. Récupérant un style dans son sac, elle prit la note, la retourna et griffonna son nom et les quelques chiffes de son numéro de téléphone.

- Pour le cas ou vous auriez encore besoin d'une assistante.

La phrase était sortie avec le naturel d'avant. Celui, teinté d'un peu de gêne, qu'elle avait pendant la douce période où la vie lui souriait. Avant qu'elle ne perde sa mère, et la paix intérieure. Elle réalisa cependant que l'acte pouvait être interprété de la mauvaise manière.

- J'ai apprécié retravailler avec vous. Je ne sais pas trop dans quel contexte cela pourrait se reproduire... mais ça serait avec plaisir.

Elle ne voulait juste pas perdre contact avec cet homme. Cela aurait été trop dommage, après avoir trouvé quelqu'un avec qui elle n'avait simplement pas peur de parler. Ils n'étaient pas si nombreux, après tout.

Et, sur ces mots, et tourna les talons et s'éloigna. A regret.
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