L'habit ne fait pas le moine. [Persona]

<< Mécénat actif

Ce mercredi donc, à 17 heures, pile, le comte s'était retrouvé devant la maison qui abritait Dalhia Anderson. La demoiselle avait répondu positivement à son invitation, ce qui n'avait pas manqué de le faire sourire. Parce qu'elle acceptait à nouveau le défi et ce serait à lui de se montrer à la hauteur. Il espérait que ce qu'il avait préparé, à défaut de la séduire, l'amuserait, au moins. Il y avait quelque chose d'intéressant à chercher à faire tomber les barrières de cette femme. Ce qui semblait quand même être le cas, quand ils s'étaient quittés lors du vernissage chamboulé de Lampeduza.

Au volant d'un VPN, l'homme s'était parqué devant le portail de la bâtisse, pour en sortir, relevant ses lunettes dans ses cheveux, alors que l'on découvrait sa tenue... d'hiver. Dirons-nous. Il portait un pantalon et une veste de ski, une écharpe autour de coup et un chapeau sur les oreilles, afin de les préserver du froid. Le tout dans des couleurs hivernales, blanc et noir, avec quelques lignes d'un bleu de givre. Le tout semblait être sur-mesure, comme bien souvent avec lui, sans doute une petite nouveauté des ateliers Richards.

Quand apparu alors son invitée, il la salua avec déférence, lui faisant un baisemain dans les règles de l'art, afin de montrer qu'il connaissait quand même un peu les codes. Et parce qu'il aimait bien, de un voir sa réaction à ce petit jeu, de deux, savait que dans son accoutrement, ça pouvait porter à rire. Et oui, il savait parfois être un pitre. Qui avait parfaitement décidé de l'être, bien entendu.

- Dalhia, quel plaisir! J'espère que vous aurez suffisamment chaud. Avec un ton mystérieux. Il lui ouvrait la porte du véhicule avant de se remettre au volant. Je vous laisserai conduire au retour, que nous soyons sur un pied d'égalité. Lâcha-t-il taquin, avant de mettre les gaz.

De Lascelle ne roulait pas comme un sagouin, il respectait les codes de la route. Tuer quelqu'un au volant de son bolide, très peu pour lui. Quand ils arrivèrent sur l'autoroute, il se permit pourtant de pousser un peu le moteur. Autant profiter de la bête.

- Comment s'est terminé votre vernissage? Comment allez-vous?

Pour faire la conversation, parce qu'il était vraiment intéressé. Parce que ce serait bien mal poli de sa part de laisser le silence continuer d'habiter l'habitacle. Surtout qu'ils en avaient pour un petit moment. Enfin pas tant que ça. Mais il se gardait bien de lui dire quoi que ce soit sur le lieu où ils se rendaient, mis à part que sa tenue avait pu parfaitement lui mettre la puce à l'oreille, mais pouvait-elle vraiment savoir?

En fait, le noble les conduisait tout deux près du snowsports center. Si ce dernier était fait pour les sports de glisse en tout genre. Il y avait à côté, un autre parc, que les familles en tout genre prenaient d'assaut que la neige soit tombée ou pas, d'ailleurs. C'était un village de vacances. Spécial. Car en été, il se transformait en parc d'eau, remplit de différent toboggans que petits et grands pouvaient emprunter pour se rafraîchir. En hiver, c'était carrément des toboggans de neige qui prenait l'entièreté de ce village qui était donc un parc. Le but était de descendre sur la neige, à dos de bouée gonflable. Et il fallait bien dire, on en faisait du sport! L'avantage d'y venir un mercredi, c'était les horaires d'ouvertures, ils en avaient jusqu'à 23 heure, sans compter qu'ils seraient sans doute un peu plus tranquille à la faveur de la nuit, la reconnaissance faciale serait plus compliquée.

Parquant le VPN, Zenon gardait un petit sourire amusé, alors qu'il sortait pour sortir de son coffre des gants.

- Vous allez voir, c'est dépaysant. Avec un petit clin d'oeil. Après tout, ils voulaient donc se mêler au commun des mortels non? N'était-ce pas ça le défi qu'elle lui avait lancé? Et rien ne prouvait encore qu'il ait oublié la pizza ensuite. Il parait que vous aimez faire un peu de sport, croyez-moi ça n'en a pas l'air, mais à force de monter et descendre... enfin vous verrez.

Et oui, notre homme connaissait un endroit pareil grâce à l'un de ses neveux, qui l'avait tiré par la manche un jour. Comme quoi, qu'importe la classe d'où vous veniez, les enfants avaient les mêmes envies. Il paya les entrées, donna le petit bracelet à la dame, puis passa le portique pour entrer sur ce terrain de jeux grandeur nature.

- Ahh! Par-là. Dans le coin se trouvait une sorte de paddock de rangement des bouées, entassées les unes sur les autres, balancées là au gré des sorties des clients. Des gamins s'amusaient à tenter de les envoyer le plus haut possible sur la pile. Le comte en attrapa deux par les poignées qui traînaient au sol, et qu'une longe raccrochait à la bouée en elle-même. Voici pour vous. Certains leur donne des noms, ne la perdez pas surtout.

Observant alors le paysage devant eux.

- Vous êtes plutôt téméraire ou un petit tour de chauffe pour commencer? Sur sa droite, se trouvait l'Everest, un toboggan fait de bois complet, qui semblait descendre à pic, comme si on était lâché dans le vide avant de se retrouver sur une piste faite bel et bien de neige. Gardons ce dernier pour la fin. Le but était donc de marcher un peu pour monter sur les dunes artificielles de neige, afin d'ensuite redescendre sur les pistes créées à cet effet.

De quoi s'amuser pour un moment, car on ne pouvait s'en rendre compte d'où ils étaient, mais le parc... il était grand.

Tout en préparant le reste de mes affaires, je jetais à nouveau un regard au message de Zenon. Très mystérieux, et difficile de deviner où il comptait m’emmener. A l’extérieur, de toute évidence, mais cela n’aidait pas à réduire les possibilités. Et cet homme continuait à me surprendre et à m’intriguer. Aussi, je ne doutais pas qu’il avait de grandes chances de le faire encore aujourd’hui. D’ordinaire, ne pas prévoir à l’avance ce qui allait m’arriver déplaisait à la control freak que j’étais, mais d’un autre côté, avec Zenon, je supposais être capable d’improviser. Et que lâcher un peu prise ne me ferait pas de mal. Entre la fin du vernissage, ce qui s’était passé au salon des inventions et l’ambiance sur l’arche, j’étais un peu sur le qui-vive ces temps. Penser à autre chose était donc le bienvenu.

Surtout en bonne compagnie.

Par sécurité, j’avais choisis des vêtements chauds et confortables, mais qui puisse tout de même être approprié à une activité sportive. Peu importe la situation, je me devais d’être en mesure de réagir au quart de tour, si les choses venaient à mal tourner. Déformation professionnelle. Espérons que cela ne serait pas nécessaire pour ces raisons, aujourd’hui. Plutôt pratique qu’esthétique, je descendis donc de chez moi dans une tenue sobre, avec un pantalon imperméable et une veste d’hiver noirs. Un bonnet de la même couleur me couvrait la tête et presque tout le visage, mais c’était une garantie d’anonymat assez appréciable. Même si, en dessous, j’avais opté pour des vêtements un peu plus élégants, au cas où. Mieux valait être prudent.

Découvrir mon partenaire du jour habillé comme pour partir aux sports d’hiver m’arracha un sourire amusé, mais me rassura également, J’avais plutôt visé juste, de toute évidence.

"Cher Zenon. Le plaisir est partagé, et j’ai bien suivi vos conseils." répondis-je avec un petit sourire en coin lorsqu’il attrapa ma main pour y déposer un baiser. Je fis mine d’attraper les pans d’une robe invisible pour faire la révérence. Sans plus attendre, je le suivis dans le véhicule, m’inclinant légèrement pour l’observer avec une expression amusée. "Très aimable. Vous payez les excès de vitesse aussi ? J’ai tendance à un peu les dépasser…"

Je profitais d’être à l’intérieur pour une durée indéterminée pour retirer un peu mon attirail, surveillant en même temps la route, curieuse de voir où nous nous dirigions. Mon attention se reporta cependant sur mon interlocuteur.

"Aussi bien que je le peux. Et vous ?" La mention du vernissage me fit pousser un léger soupir, suivi d’un petit geste agacé "C’était plus agité que prévu. Le président peut bien lancer sa campagne anti-corruption, mais de préférence pas pendant ce genre d’événements… Comme si je n’avais pas assez à faire en générale. Je fis une légère moue, avant de retrouver un sourire : Vous en avez profité pour acheter des tableaux ? Si le peintre ne sera plus capable de produire des œuvres, sa cote va peut-être s’envoler…"

Et c’était tout ce que je souhaitais à Vito Lampeduza : qu’il ne reste de lui plus que ses croûtes. Et que sa compagne ne soit qu’un lointain souvenir. Mais c’était une autre histoire, et je préférais ne pas y penser aujourd’hui, pour une fois. De toute manière, notre arrivée au Snowsports Center accapara bien vite mon attention. En le voyant se diriger vers le parc avenant, et à distinguer les toboggans, je laissais échapper un léger rire.

"Je n’en doute pas. Je n’ai jamais eu l’occasion d’en faire, alors, c’est le moment de découvrir." Petite, Jens et Stefan m’emmenait plutôt à la piscine, mais jamais aux sports d’hiver. Trop capitaliste à leur goût. J’avais un peu tenté le ski et le snowboard au Japon, mais sans plus. Cependant, ça, c’était très intriguant, je devais le reconnaître. Je rendis son clin d’œil à Zenon. "Vous avez vraiment pensé à tout."

Je le suivis, le laissant payer l’entrée mais en comptant bien me rattraper par la suite, avant d’entrer dans le parc à proprement parler. Curieuse, je fixais les différentes installations, puis les énormes bouées que me désignait De Lascelle. J’attrapais la rallonge d’une pour m’en occuper, et fis un signe de tête.

"Merci. Un nom ? Hum… pourquoi pas Zenon ?" Répondis-je, malicieuse et provocatrice. "Comme ça, si je perds l’un ou l’autre, j’en aurai toujours un pour me tenir compagnie."

J’écoutais ses conseils pour débuter dans le parc, mon regard étant naturellement attiré par l’énorme tour qui surplombait les pistes, et qui débutait presque à la verticale. J’esquissais un petit sourire de défi, mais préférais rester raisonnable. Pour débuter.

"Un peu d’échauffement ne peut pas faire de mal. Je ne voudrais pas vous abîmer tout de suite." Je le suivis en montant la pente enneigée, ma bouée Zenon derrière moi. La neige, et la montée offrait une résistance que j’étais ravie de pouvoir défier, avançant avec énergie, sans toutefois trop me hâter non plus, sous peine de me fatiguer trop vite. Même s’il en fallait beaucoup. Je me tournai vers Zenon. "Habitué des lieux ?"

Dalhia avait donc suivit ses conseils et avait donc eu la très bonne idée de mettre des habits chauds, fait pour l'hiver, très bien. Il l'accueillait d'un sourire, avant d'embarquer dans le véhicule. Un petit rire marqua donc ce premier échange. En plus cette femme avait donc une conduite pour le moins... sportive.

- Bien entendu, vous êtes mon invitée. Fit-il sur le même ton. Il n'avait guère peur des défis et puis, qu'était-ce qu'une amande pour excès de vitesse? Rien de très grave, pour lui, ce serait la jeune femme qui pouvait perdre son permis, lui juste quelques livres, rien de bien grave qui risquerait de faire un trou à son budget.

Du coin de l'oeil, il observait parfois son invitée, en souriant amusé de la voir tenter de deviner où il pouvait bien l'amener. Si elle connaissait la route, elle pourrait sans doute découvrir très vite le secteur et donc l'idée, mais il fallait connaître ce village de vacance et ce n'était sans doute pas des gens de leur acabit, qui avaient pu passer des journées en famille dans un tel parc.

- Pas si mal. L'écoutant alors, presque surpris de l'entendre se plaindre ainsi de ce coup d'éclat de la part de MacBeathag. Pourtant, j'ai trouvé cela audacieux de sa part. Il a eu raison de montrer de quoi il était capable. Nos petites personnes ne sont que secondaire pour le coup. Enfin lui, ça ne l'avait guère dérangé, c'était un fait. Oui, j'avais mis une option sur l'un des tableaux. Et ce n'est pas sa côte de popularité qui m'importe. Pas pour le moment en tous les cas.

Une toile avait marquait son regard, il y avait vu quelque chose d'assez beau pour la vouloir chez soi. Ce n'était rien de terriblement audacieux comme l'arrestation du peintre, mais la légèreté du trait, les couleurs, lui avaient plu. Sans rien de plus. Enfin, fallait-il vraiment se donner une excuse pour l'achat d'une œuvre, quand simplement, elle nous avait tapé dans l'œil?

Le comte ne pouvait se douter de la haine de cette femme contre le peintre, mais il pouvait par contre déduire qu'elle ne l'aimait guère, déjà parce qu'en général, il devait représenter ce qu'elle détestait chez les hommes, mais en plus, vu son travail de sous-marin, pas de doute qu'un parrain de la pègre, devait être plus avenant derrière des barreaux que libre. Enfin, cela n'était pas de leur ressort, alors autant profiter de la journée, plutôt que d'en noircir le tableau.

- Il n'y a pas d'âge pour découvrir. Fit-il d'un ton taquin, ravi de voir qu'elle riait de son idée. Au moins ne s'était-il pas totalement planté. Oh disons que j'essaie d'être un homme prévoyant ou en tous les cas, autant que j'en suis capable. Lui tendant les gants.

La queue n'avait pas été très longue, ils étaient déjà dans le parc, une bouée chacun en main. La répartie de la demoiselle ne manqua pas, encore une fois, de l'amuser.

- Vous avez pensé à tout, je suis impressionné. Observant la bouée. Je sais déjà que vous me direz que sa compagnie était plus intéressante que la mienne, bien qu'il ne soit pas très bavard, cet homologue gonflable. Joueur, lui aussi.

Tant que chacun goûtait à l'humour de l'autre, pourquoi s'en priver? Dès qu'ils se trouveraient lourd l'un, l'autre, ils arrêteraient de se côtoyer sans doute. Ce qui serait dommage, pour l'instant, le noble appréciait cette compagnie. On pourrait le traiter de maso à toujours se retrouver en compagnie de femme qui n'hésitait pas à lui rentrer dedans pour un oui ou pour un non, mais c'était possiblement ce qu'il était. Pourquoi se priver de bonnes joutes verbales avec des gens qui en valaient la peine, sous prétexte qu'il pouvait se retrouver dans les cordes à n'importe quel moment? Voilà où était tout le plaisir. Et Dahlia n'était pas là pour gâcher ce plaisir, bien au contraire.

- Vous êtes bien aimable!

Tirant alors sa bouée dans son dos, il prenait le chemin de la première montée, prenant son temps pour ne pas s'épuiser tout de suite. Il n'était certes pas aussi sportif que la mannequin, mais il avait quand même son physique, lui aussi. Il marchait d'un pas soutenu.

- Pas un habitué non. Mais j'ai déjà dû y accompagner mes neveux. Ils raffolent de cet endroit. Ce qui est compréhensible. Vous ne connaissiez pas?

Arrivé sur les hauteurs, il montra d'un mouvement de la main la première piste qu'ils pouvaient emprunter. De là où ils se trouvaient, on pouvait voir qu'une autre colline pouvait être gravie pour rejoindre d'autres pistes et que sur la gauche, si l'on continuait tout droit, il y avait d'autres endroits où descendre, le domaine était vraiment immense. Mais pour le moment, mieux valait commencer par quelque chose de plus calme, ou en tous les cas, comprendre les mécaniques.

- C'est assez simple. Vous tenez toujours votre rallonge, vous vous asseyez sur la bouée et hop, vous vous lancez. Je vous montre. Dans un élan, il se lançait sur sa bouée qui partait directement dans la descente et croyez-le ou non, la vitesse pouvait être impressionnante, même sur une pente pour débutant, alors quand ils iraient sur des pistes plus vertigineuse encore, les sensations seraient meilleures. Yay!

Un vrai gamin.

L’excès de vitesse avait été une petite provocation. Non pas que ma conduite puisse être qualifiée de sage, mais je savais éviter de me faire pincer. Comme toujours. Quoi qu’il en soit, l’invitation à conduire au retour fut la bienvenue et reçue avec un grand sourire espiègle. A défaut de savoir ce qui m’attendait, je savais au moins que la fin de ce périple serait intéressante. Et rapide. Mais en attendant, je lui laissais volontiers le volant, préférant essayer de deviner où il nous emmenait.

On ne pouvait décemment pas passer à côté de notre dernière rencontre au vernissage, et de l’arrestation magistrale de Lampeduza. Un petit haussement d’épaules fit office de réponse à son avis sur le coup porté par le président.

"Je ne sais pas vous, mais je n’aime pas être secondaire dans ma propre vie." Sourire en coin, puis, avec un peu plus de sérieux : "Mais ne vous trompez pas. Je suis ravie de ce nouveau président et qu’il fasse quelque chose. Espérons que cela sera le cas sur le long terme."

Je l’appréciais bien après tout, MacBeathag. Ce n’était pourtant que le début de son mandat, et sa première grande action d’envergure. Il ne fallait pas que cela reste de la poudre aux yeux, et chacun devait être prêt à lui tomber dessus s’il ne continuait pas sa politique prometteuse. Ce milieu ne devait pas faire plus de cadeaux que le mien.

Concernant la peinture, j’étais plus nuancée. Difficile d’apprécier l’œuvre quand on ne pouvait la dissocier de son créateur. Mais à en croire mon interlocuteur, le peintre n’était pas surcoté pour rien. Appuyant mon menton sur mon poing, j’observais Zenon avec un sourire.

"Acheter une œuvre parce qu’elle nous plaît est mieux que pour le profit qu’on peut en tirer."

Un tableau n’est après tout pas une marchandise comme une autre, comme le reste de l’art. Ce que notre société avait un peu trop tendance à penser. L’art, tout comme la beauté, cela ne s’explique pas, ou ne se justifie pas. Et puis bon, si De Lascelle avait envie de dépenser son argent pour un tableau, une moto ou une toilette en or massif, qu’avais-je à y redire ? De toute manière, le mystère sur notre destination fut vite levé, alors que nous arrivions à un parc à neige assez particulier.

D’emblée, je fus intriguée et amusée. Cela faisait longtemps que je n’avais pas fait de la luge, ou un quelconque sport d’hiver. Mais de le choix de Zenon semblait avoir été bien préparé, et je devais avouer qu’il avait bien réussi son coup.

"Vous faites ça très bien." répondis-je avec un clin d’œil. "Pour le moment, du moins. Je compte sur vous pour la suite."

Nos bouées en main, il était temps de se lancer. Il ne me fallut pas longtemps pour trouver un nom à ma nouvelle compagne, non sans un peu d’humour. Mon sourire s’agrandit encore un peu plus à sa répartie.

"Ma foi, je suppose que j’ai cette journée pour savoir décider qui sera l’élu de mon cœur. Pas trop de pression, cependant. Votre discussion est appréciée. Très appréciée."

Soyons sincère, après tout. Notre choix pour une première descente se porta sur une piste facile, pour débuter en douceur. Et mieux attaquer les plus ardues par la suite. On commença à gravir la pente, nos bouées derrière nous. Ce qui me laissa un peu de temps pour savoir comment une telle idée avait pu lui venir. Tiens donc, des neveux. Un sourire s’esquissa sur mes lèvres alors que je l’imaginais accompagner des enfants dans un endroit pareil. Un homme bien différent de ce qu’il devait être au travail, sans doute.

"Vous vous amusez donc autant qu’eux ? Et votre bouée alors, elle a un nom aussi ?" Je secouai la tête de gauche à droite. Jamais. "Mais j’ai des nièces aussi, et c’est vrai que ce serait un endroit parfait pour les emmener. Merci pour l’idée. "

Anny et Lou adoreraient certainement. Et Léon aussi, il me faudrait lui proposer, ainsi qu’à Matthew. Enfin pour l’heure, il fallait déjà faire cette première descente. J’écoutais Zenon m’expliquer comment procéder. Un sourire en coin suivit sa proposition, et déjà, je préparais mon « Zenon » personnel pour me lancer à sa suite.

"Rien de plus simple, en effet."

L’instant d’après, je dévalais la piste à une vitesse assez élevée, mais qui me plut tout de suite. J’en profitais pour essayer de saisir comment diriger au mieux la bouée, et me retrouvais en bas bien trop vite à mon goût. Un éclat de rire termina la glissée de mon véhicule, et je fus debout en un rien de temps, prête à repartir.

"On passe au niveau supérieur ?"

Inutile d’être devin pour deviner que je m’amusais beaucoup.

Un fin sourire marqua ses traits. Secondaire de sa propre vie, elle y allait fort. A moins qu'elle ne plaisante, mais l'on pouvait se rendre compte, aussi, que cette jeune femme ne se prenait pas pour la queue de la poire. Alalala, il fallait voir à respirer un peu. Depuis le temps, Zenon avait compris qu'il n'y avait pas que lui et sa petite existence qui comptait, même s'il la faisait passer au premier plan. Enfin, ce n'était peut-être qu'une nouvelle sorte d'humour de la part de son interlocutrice.

- Disons que pour certains événements, cela ne me dérange guère. Je sais mettre mon égo dans la poche. Elle redevenait plus sérieuse en parlant du Président. Ce dernier divisait, soit on appréciait sa façon de faire, soit pas du tout. Il ne devait pas avoir que des amis, même au sein de son propre parti. Le comte quant à lui, admirait sa force de caractère, cette assurance qu'il avait de vouloir aller jusqu'au bout, malgré tous les risques qu'il pouvait prendre. Se moquant bien qu'on le trouve sympathique ou non. Il avait voté pour lui et ne le regrettait guère. Espérons-le, en effet, mais j'avoue être assez optimiste le concernant. Il n'a pas l'air d'être le genre d'homme à faire des compromis qui n'irait pas dans le sens que lui aura décidé et ce n'est pas plus mal. Les choses pourraient changer, je suis curieux de voir la suite.

Au moins étaient-ils d'accord concernant la peinture, enfin ils étaient d'accord sur pas mal de point, si on était honnête. Et s'ils s'accordaient pour le voir. Il eut un petit mouvement de la tête à ses paroles.

- Tout à fait. Si l'on achète une œuvre en espérant la voir prendre de la valeur au fil du temps ou à la mort de son créateur, il n'y a pas plus d'intérêt et c'est un jeu qui peut s'avérer presque dangereux. On peut perdre beaucoup d'argent... qui ne dit pas que dans dix ans il aura perdu toute sa valeur - surtout si son auteur reste en prison -. Taquin.

Terminant de mettre correctement le bonnet sur ses oreilles, il eut un sourire à nouveau amusé. Cette femme avait clairement une répartie qui lui plaisait. Il n'aurait jamais cru, voilà quelques semaines plus tôt, qu'ils pourraient autant bien s'entendre et que lui, pourrait apprécier de la supporter plus de quelques heures. Ce qui était surprenant et agréable.

- Je suis sous pression!

Les bouées attrapées, il n'y avait plus qu'à faire l'escalade de la première pente. Les choses iraient assez vite, une journée dans ce parc passait à une vitesse assez impressionnante, il s'en était rendu compte la dernière fois avec ses neveux. Et ce n'était pas parce qu'ils n'étaient que deux adultes que cela changerait.

- Au pire, vous avez le droit de partir quand vous le souhaitez, je ne vous garde pas prisonnière ici. Toujours sur son ton taquin. Oui, j'avoue que je m'amuse toujours beaucoup avec eux. Ils aiment bien dire que je suis un grand gamin, ce qui n'est pas totalement faux. Après tout, la vérité sort de la bouche des enfants. Marquant un temps. Ma bouée? Hum, le dragon. Avec un sourire en coin, sa petite pensée pour Amélia n'amusait que lui, mais... il ne pouvait pas s'en empêcher. Quoique... cet animal mythique pouvait aussi parfaitement représenter Dalhia à ses côtés. Je vous en prie, je suis certains qu'elles aimeront, c'est le rêve pour eux ici.

Un parc remplit de neige, pour y faire de la luge toute la journée. Quoi demander de mieux? Même les adultes adoraient, alors bon. Ils étaient donc en haut de la première piste. Les explications faites, de Lascelle n'avait pas attendu pour se lancer. Il regardait ensuite son invitée faire de même. A voir sa tête à l'arrivée, il savait que son pari était réussi, elle était plus que satisfaite.

- Je vous attends. Tirant à nouveau sa bouée. N'essayez pas de diriger quoi que ce soit. Elles font bien ce qu'elles veulent. Montrant une sorte de remonte-pente. On va prendre ça, vu qu'on monte plus haut. Vous sautez dans la bouée accrochée au câble, en tenant la vôtre et on se retrouve en haut.

Chose dite, chose faite. Assis sur sa bouée, le noble observait le parc s'étendre à leur pied. Et dire qu'arrivé tout en haut, il y en aurait encore plus. Voilà pourquoi les journées passaient à vitesse grand V par ici. Une fois à nouveau sur ses pieds, il attendait Persona.

- Alors, si nous allons prendre cet autre remonte-pente, il y a plusieurs pistes à bosses qui nous attendent. De ce côté, ce sont les plus vertigineuses. Et... je vous laisse choisir.

Ainsi que découvrir. Il avait suffisamment fait le guide pour le moment.

L’ego, l’ego, l’ego. Je n’en manquais pas, je ne pouvais le nier. Néanmoins, il s’agissait plutôt d’une fierté mal placée dans certaines situations. Le reste faisait partie de mon persona, frivole et légère. Avec Zenon, j’étais un peu des deux. Pas encore assez en confiance pour me montrer réellement, mais assez pour en dévoiler plus qu’avec beaucoup. Et puis, mon amusement était sincère. C’était plutôt rare que ce soit partagé, d’ailleurs.

"Vous êtes un homme raisonnable. Et je ne suis qu’une enfant." Petit sourire candide. Ce n’était pourtant pas totalement faux. J’étais jeune, et j’en avais confiance. Malgré la maturité que j’avais pu obtenir, je manquais d’expérience. Surtout en comparaison de personne comme Amelia ou Miranda. Mais je faisais comme si ce n’était pas le cas. Jouer et faire semblant, c’était mon métier après tout. "Je suis curieuse également. Mais je crains être un peu plus réservée que vous. Nous verrons bien qui de nous deux aura raison."

L’art était devenu un marché comme un autre. Pourtant, cela n’était pas l’avis de mon interlocuteur. Et d’un côté, j’en étais plutôt ravie. Lorsqu’on voyait un homme traiter sa femme comme un tableau ou une montre, cela pouvait donner des envies de meurtres. Et j’étais justement là pour ça.

"Les lois du marché et du destin sont parfois étranges. Et incontrôlables." confirmai-je, avec un hochement de tête.

Terminant de nous préparer, la discussion continuait assez agréablement. C’était en tous cas un jeu qui semblait nous plaire à tous les deux, et les réparties ne manquaient pas. Sans parler de ce qui nous attendait sur les pistes et qui s’annonçait également très intéressant.

"On ne dirait pas, sous votre flegme. Vous ne perdez jamais votre calme ?"

Difficile effectivement de l’imaginer s’emporter, après tout ce que je lui avais fait subir. Quoique, j’avais fait pire. Et il ne le méritait pas, il fallait le dire. Surtout alors que nous escaladions la première pente de ces toboggans de neige. La curiosité et l’enthousiasme se dissimulaient difficilement sur mon visage, et mon pas rapide me trahissait également.

"J’espère bien." Nouveau sourire en coin. Elle n’était pas née la personne qui m’entraverait. Plus que le reste, ma liberté était la chose la plus précieuse que j’aie. Du moins, c’était encore ce que je croyais. "Ça ne me surprend pas du tout. Surtout en voyant que vous m’avez amenée ici. C’est que vous devez y prendre aussi beaucoup de plaisir." Je lui adressai un clin d’œil, songeant ensuite sérieusement à emmener mes nièces ici. C’était vrai que c’était un paradis pour les enfants.

Et également pour moi. La première descente apporta tout ce que j’avais imaginé en termes de sensations, et bien plus encore. Raison pour laquelle je n’attendis même pas d’être complètement arrêtée pour sortir de ma bouée, prête à recommencer. Plus haut, et plus fort.

J’hochai la tête aux explications de Zenon, m’installant dans la bouée derrière lui sur le remonte-pente. La montée fut passée à observer le parc qui s’étendait à nos pieds, et qui promettaient encore tellement de descentes. Rejoignant mon cavalier du jour, j’observais les deux choix. Et fis durer le suspense un peu plus que nécessaire.

"J’espère que vous n’avez pas le vertige… le dernier arrivé paie un verre à l’autre."

Et ceci dit, je fonçai comme une flèche en direction des pistes les plus raides, amusée mais également sérieuse. Compétitive jusqu’au bout des ongles, petite et rapide. Oh, et je ne faisais pas de cadeau.

Alors là, Zenon ne manqua pas d'éclater de rire, si Dalhia tentait de lui faire croire une seule seconde qu'elle n'était qu'une enfant... peut-être pouvait-elle avoir des réactions enfantines, mais il ne les avait pas vues. Non, lui ce qu'il voyait, c'était une jeune femme, déterminée, qui ne se laissait pas marcher sur les pieds et qui était, en effet, plus réservée qu'elle ne le laissait paraître. Qui portait une armure, des barrières qui se baissaient pour peu de personne, une fois qu'elle les avait suffisamment observés. Autant dire que ça n'avait rien avoir avec ce que ferait un enfant, bien au contraire. Son regard encore pétillant de son rire, il l'observait amusé.

- Bien sûr. Une enfant, vous avez en tous les cas de l'humour.

Et lui raisonnable... ce n'était clairement pas ce qui le définissait au mieux. Il savait l'être dans les situations qui l'exigeaient, mais c'était un fêtard, un homme qui aimait brûler la vie sur les deux bouts, qui se moquait de ce que l'on pensait et qui profitait de ce que cette vie, justement, lui apportait. Il n'y avait guère de raisonnable là-dedans. Cela ne l'empêchait pourtant pas d'être optimiste et réaliste sur ce qui l'entourait, surtout en ce qui concernait ce nouveau Président.

- Oui, nous verrons. C'est à lui de nous surprendre.

En ce qui concernait Lampeduza et ses toiles, il n'eut qu'un mouvement de la tête, en effet, tout ceci était incontrôlable. Mais une chose était certaine, un artiste controversé valait toujours plus cher qu'un autre. Son fin sourire ne quittait pas ses lèvres, alors que la discussion allait bon train. La question était justifiée, est-ce que quelqu'un avait déjà pu voir de Lascelle en colère? C'était quelque chose d'assez rare, même presque inexistant. S'il s'énervait, il le montrait peu, perdre son calme, ce n'était clairement pas dans son ADN. Parce qu'il savait qu'en général, son flegme était sa meilleure réponse, à beaucoup de chose. A quoi bon perdre ses nerfs?

- Rarement, il est vrai. Mais la pression, c'est autre chose, surtout avec une enfant comme vous. D'un petit air taquin.

Ah bah, elle lui avait ouvert une porte, il n'allait pas s'en priver, c'était bien son genre de jouer ainsi. Surtout qu'il avait l'impression qu'étonnamment, la demoiselle répondait positivement à tout cela. Elle qui semblait le détester profondément il y a quelques temps en arrière. Oui, les choses pouvaient changer.

- Je ne prendrai pas ce risque, je tiens à mes jambes. Il blaguait, mais à moitié, quelque chose lui disait que miss Anderson n'avait pas intérêt à être mise trop en colère, elle. Vous vouliez être surprise, j'en ai profité, j'avoue. Pourquoi les enfants seraient les seuls à avoir droit à s'amuser dans ce genre d'endroit. Finalement, ils sont faits pour les gamins, comme pour les adultes.

Qui n'aimait pas glisser sur une bouée aussi? Etre sur une bouée tout court, sur la neige, sur l'eau. C'était du fun et c'était tout ce qu'on leur demandait. Bref, nos deux compères se retrouvaient donc en hauteur, pour voir l'étendue du parc, son invitée décidait donc pour eux. Les descentes vertigineuses, un sourire amusé marquait les traits du comte.

- Jamais. Allons-y! Marchant d'un bon pas, accompagné de Dalhia, ils se retrouvèrent vite dans une petite ligne d'attente avant de pouvoir se lancer au bas de la piste. Si je donne l'impression de m'amuser, vous aussi. Je préférai vous le faire remarquer, au cas où.

En plus, l'avantage de se retrouver dans un truc de neige, recouvert de la tête au pied, c'était bien le fait que l'actrice risquait de ne pas être reconnue et donc, ennuyée par une nuée de fan avide d'avoir des photos et des autographes. Pas comme au Mcdo où ils avaient rapidement été encerclés par tous ces gens. Il ne faudrait pas trop qu'on les reconnaisse d'ailleurs, cela risquerait de mettre encore plus de poids à la rumeur qui disait que ces deux-là étaient en relation intime. Ce qui n'était clairement pas le cas.

Le temps d'attente n'était jamais très long, ils pouvaient se lancer à leurs tours sur la piste.

- Ce sera un peu différent là. Je dois tenir votre bouée, vous la mienne, pour être sûr de ne pas partir en-dehors de la piste. Sauter dans la bouée, je nous pousse, qu'on prenne un peu plus de vitesse. Puisqu'elle aimait aller vite. Avec une certaine puissance dans les bras, le comte donnait alors une forte poussée aux bouées, sautait dans la sienne et ils glissèrent à une bonne vitesse. YAY! Dommage que les descentes ne duraient que quelques secondes finalement, même si elles paraissaient longues à observer. Encore?

Ou pire? Elle était la reine de la journée, qu'elle choisisse.

L’éclat de rire de Zenon fut assez inattendu, mais également très vite contagieux. Il me fit pouffer à mon tour, me rendant encore un peu plus légère. Nous étions plus que ce que nous laissions paraître, infiniment plus complexes que ce que certains voulaient nous faire croire. Peut-être que j’étais jeune, mais cela ne rendait pas moins réel ce que j’avais vécu, et ce que je vivais. Quant à Zenon, il pouvait être raisonnable, mais quelqu’un qui l’était entièrement ne m’aurait pas emmenée dans un tel endroit. Comme quoi, les choses étaient bien telles qu’elles étaient, parfois.

Nos discussions étaient aussi rafraîchissantes que l’air ambiant, même si nous n’avions pas toujours le même avis sur certains sujets. Je pouvais être assez intransigeante dans mes opinions. Voire, beaucoup. Mais mon interlocuteur conservait malgré tout son calme. Je lui demandais donc s’il lui arrivait de le perdre parfois, en bon humain qu’il était. J’avais encore un peu de peine à l’imaginer se mettre en colère, et pour quelles raisons possibles. Toutefois, je ne doutais pas que cela devait être terrible. Sa réponse me tira un nouveau sourire, et je lui tirai la langue, pour jouer le jeu jusqu’au bout.

"Je suis certaine que vous vous débrouillerez très bien pour la gérer."

Si cela continuait comme ça, pourquoi pas. Mais il était vrai qu’il ne fallait pas faire l’erreur de me sous-estimer. Ce que mon compagnon du jour semblait avoir compris. Malgré ses airs joueurs, il restait pragmatique. Même dans ses choix d’activités. Et je n’allais pas lui donner tort.

"Je suis bien d’accord. Tant qu’on s’amuse, peu importe l’âge. Et ça me fait du bien, d’être surprise de temps en temps." Je lui accordais volontiers cela. D’autant qu’il me le faisait remarquer. Je lui répondis d’un sourire, avant d’ajouter : "Je me réjouis de voir ce que vous allez trouver, pour la prochaine fois."

Les choses se passaient bien, alors pourquoi ne pas réitérer ? La possibilité d’un autre rendez-vous était sous-entendue, mais sincère. Enfin, d’abord, il fallait voir ce qu’allait donner cette nouvelle descente. Si la possibilité de faire la course était exclue, autant faire le maximum pour aller le plus vite possible. Je hochai la tête, avant de prendre un peu d’élan pour lancer les bouées, avant que Zenon ne les pousse encore plus, J’agrippais la sienne, laissant échapper un léger rire de temps à autre lorsque les bouées nous secouaient durant la descente. Cette dernière dura peu de temps, mais bien assez pour en profiter pleinement.

Une fois en bas, je sautai hors de ma bouée avec souplesse et énergie, avant de tendre une main pour aider mon partenaire à sortir de la sienne. Cette descente avait encore rougit un peu plus mes joues, mais n’avait pas altérer mon sourire. Bien au contraire.

"Encore !" Je pris la direction de la file, me tournant vers lui pour lui adresser un clin d’œil : "Et je vous préviens, j’espère que vous me paierez quand même un verre, à la fin."

Il faudrait bien ça, après une journée à dévaler ces pistes. Au moins, cela promettait une suite de programme intéressante. Mais pour l’heure, il nous restait encore de nombreuses descentes à essayer. Et je ne manquais pas d’énergie pour toutes les faire, curieuse de voir si Zenon suivrait. Mais je l’espérais, car c’était définitivement mieux à deux, comme expérience

Oui, c'était agréable cette sortie. Loin des flashs, des tapis rouges, des noms, des étiquettes. Ils pouvaient être tranquilles et sans doute plus vrais qu'ils ne l'étaient en public. Ici personne ne semblait les voir, les reconnaître. Une façon de pouvoir parler sans détour, de se montrer sans doute sous un jour plus tranquille et réaliste. Ce qui n'était pas un mal. Encore plus pour la jeune femme, sans aucun doute. Vu son métier, ce qu'elle faisait, il savait que le paraître était plus qu'important. Alors quand le masque pouvait tomber quelques heures, c'était un plaisir qu'il ne fallait pas bouder. Bien au contraire. Et il aimait la découvrir ainsi. Son humour était plaisant, sa conversation aussi, une bonne répartie, bref, quelqu'un avec qui il avait plaisir à échanger. Tout comme partager ce moment sur la neige.

- Nous verrons, c'est surtout le retour que je crains. Fit-il taquin.

Son sourire s'aggrandit un instant. Ah voilà qu'elle voulait qu'il la surprenne encore. Décidément, elle allait y prendre goût. Ce qui ne le dérangeait aucunement. Il appréciait de faire changer les gens d'avis sur lui. Surtout de cette façon. Ce qui démontrait un peu plus sa capacité à savoir charmer son entourage.

- Vous aimez me défier, n'est-ce pas? Et que gagnerais-je si j'y arrive à nouveau?

Quoi? Cela n'impliquait rien d'autre que de lui lancer, à elle aussi, un petit défi. Il prendrait ce qu'elle lui offrirait, bien entendu. Zenon n'attendait rien de particulier, il était juste curieux de voir ce qu'elle pourrait être capable de faire. Elle qui ne semblait pas avoir froid aux yeux. En tous les cas, son cerveau se mettait déjà au travail pour trouver la prochaine excursion qu'il lui ferait faire. Enfin, ils devaient déjà terminer celle-ci. Il eut un rire alors qu'ils se retrouvaient déjà au bas de la piste, les joues rouges marquées par le froid. Dalhia faisait vraiment figure d'une enfant pour le coup, mais ça lui donnait un air charmant. De Lascelle attrapa la main tendue, pour pouvoir se relever, il avait moins de facilité à sortir de ces bouées que la jeune femme.

- Merci. Hochant de la tête. Bien entendu, je vous offrirai un chocolat chaud!

Mais d'abord, ils remontaient, pour redescendre, encore et encore. Ils semblaient s'amuser comme des fous. Toutes les pistes avaient été faites au moins une fois. Ils se retrouvaient finalement à la voiture, la nuit était déjà tombée, la fatigue se faisait un peu sentir, tout ceci avait été physique quoi qu'on en dise. Les clés volaient dans la main de la demoiselle, puisqu'il lui avait promis de la laisser conduire au retour. Elle avait eu le pied lourd sur l'accélérateur, en effet, mais sa conduite était précise. Le comte n'avait pas été inquiet une seule seconde.

Arrivé à bon port, il alla lui ouvrir la porte de la voiture, un petit sourire en coin, ravi de sa journée.

- Merci pour votre compagnie Dalhia, ce fût un vrai plaisir. S'approchant légèrement, tout en sortant un mouchoir, pour lui essuyer le haut du coin de la lèvre. Il restait du chocolat. Petit sourire amusé, avant de prendre sa main pour la saluer comme il le faisait toujours. Nous nous voyons bientôt, donc?

Zenon relevait donc à nouveau le défi, il allait y réfléchir et reviendrait vers elle une fois que cela serait sûr. Même s'il ne doutait pas qu'ils allaient sans doute se croiser à nouveau dans quelques soirées mondaines prévues au court des prochains mois. De quoi pouvoir la revoir non sans un certain plaisir. Remontant dans son véhicule ensuite, il quittait la villa pour revenir chez lui.

Fatigué certes, mais satisfait, car oui, la journée avait vraiment été plaisante.