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[Sujet clos] Clouds in my coffee| McGrenouille

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Jeu 11 Mai 2017 - 1:14
Dire qu'Holli était une fille du soleil était très exagéré. Si la métisse ne détestait pas l'astre solaire, et appréciait ses rayons la plupart du temps, elle lui préférait largement la pluie. Une chance qu'elle soit née écossaise, en un sens, puisque la pluie, à Edimbourg, c'était aussi rare qu'un pigeon à Paris. Ou Londres. Ou n'importe quelle grande ville avec assez de miette par terre pour attirer la gente aviaire.
Toujours était-il que les cordes, chiens et chats ou peu importe ce qui crevait les nuages et s'abattait sur les toits, avaient tendance à ravir la jeune femme, pour une raison aussi étrange qu'inconnue. On aurait pu penser qu'une Prodige douée du don de pyrurgie aurait tendance à préféré la chaleur brûlante d'un été caniculaire, mais il fallait croire qu'Ash avait toujours eu l'esprit de contradiction.

Aussi, quand en ouvrant un oeil ce jour-là, elle avait entendu la pluie marteler les vitres, un grand sourire avait étiré ses lèvres avant même qu'elle n'ouvre les yeux. Un rapide coup d'œil au réveil qui traînait, retourné, sur le carton qui lui servait de table de nuit l'informa que soit Kenny était définitivement à la bourre pour aller à l'école, ou alors qu'il avait tout fait pour ne pas la réveiller en se préparant. Par acquis de conscience, elle sauta à terre, enfila la seule pantoufle qu'elle trouva près du lit et courut jusqu'à la chambre pour vérifier que son gamin n'avait pas, lui, loupé le réveil. La chambre était déserte, et la montée d'adrénaline redescendit aussi sec, alors qu'elle passait le bras par la porte de la salle de bain pour chopper à tâtons son peignoir, qui pour une fois ne traînait pas au pied de son lit. Elle alluma la radio, qui se mit à égrener une musique rock assez entraînante. Holli repassa derrière le paravent qui protégeait son coin chambre à la recherche de sa pantoufle manquante. Planquée sous ses vêtements de la veille.

L'appart' n'avait qu'une chambre, qu'elle avait laissé à son fils, s'aménageant une partie du salon en chambre, dissimulée par une bibliothèque et un paravent métallique qui lui servait à l'occasion de portemanteau et de penderie. C'était le seul endroit de la maison ou son fils n'avait pas l'autorisation de mettre de l'ordre, et heureusement pour lui, il se serait arraché les cheveux. Holli quitta son nid en sifflotant l'air de la chanson des Beach Boys jouée par le poste radio, et pris la direction de la cuisine, passant une main dans ses boucles en bordel. Elle contempla avec une grimace la cafetière vide, puisqu'elle oubliait de racheter du café depuis à peu près trois semaine et six jours. D'habitude, du jus d'orange faisait l'affaire. Mais d'habitude, elle était pressée. Aujourd'hui, peu importait, le lundi était son jour de congé. Alors tant pis si elle se levait a 10h passées, et si elle devait commencer sa journée en achetant du café... où en allant s'installer à une table d'un café avec un bouquin auquel elle ne toucherait probablement pas, et regarder la pluie en dessinant des trucs dans la buée soufflée sur la vitre.

Rien que cette perspective la mettait de bonne humeur. Elle passa un jean tâché de peinture et le premier tee-shirt qu'elle put trouver, enfila une veste à capuche par dessus et sauta dans ses rangers marrons toutes déglinguées sans les lacer et s'en fut, choppant son sac au passage. Sans parapluie, les parapluies, c'est pour les faibles. Roulant et s'allumant une clope du doigt (le majeur) devant la loge de la petite vieille qui épiait le moindre de ses faits et gestes, elle poussa la porte et sortit.

Trente secondes plus tard, elle était trempée, sa clope était éteinte et ressemblait plus à une demi-molle qu'à une cigarette. Elle la jeta, cherchant des yeux un abri. Haha! Trouvé. Non loin, la devanture d'un café se détachait des façades d'immeuble. Holli se mit à courir pour parcourir les quelques 200m qui la séparait du Nirvana. Une de ses chaussures décida de lui fausser compagnie, préférant le suicide au milieu de la rue que de continuer à vivre une vie aussi irresponsable.

La métisse se retourna, pour la fixer des yeux, et, à moitié soupirant, à moitié morte de rire, rebroussa chemin pour sauver la malheureuse de la noyade assurée, avant de continuer sa course.

Plus occupée à regarder ses pieds que devant elle, elle rentra dans un corps étranger qui entrait, sortait ou simplement passait devant le café, n'ayant rien demandé à personne.


- Oh! Scusez-moi.

Holli releva le visage, sincèrement désolée, de la pluie dégoulinant sur ses joues, un peu ahurie. elle reconnu la victime de son sprint erratique.

- Hey! M'sieur McGregor, c'est ça? Vous allez bien?

Un sourire qui dépassait probablement de son visage succéda à la surprise. Il était intervenant à la Potentiel Home, et Kenny avait eu l'occasion d'avoir cours avec lui de musique et spectacle plus d'une fois. Il l'aimait bien. Elle aussi, du peu qu'elle avait pu voir, les rares fois ou elle l'avait croisé, dans les couloirs. Mais il n'y avait pas grand monde qu'Ash détestait. Ou plutôt si, mais pas sans une bonne raison, que le musicien ne lui avait pas encore fournie. Puis lui vint à l'esprit que le pauvre homme n'avait probablement pas en tête les visages de tous les parents d'élèves, fussent-ils intervenants occasionnels. Elle vida sa chaussure en la retournant et la laissa tomber au sol, y glissant sa chaussette et son pied détrempés. Puis, joyeusement, elle sécha sa main sur son tee shirt, trouvant presque par miracle une zone qui avait épargnée par la pluie, et la lui tendit.


- Holli. Maxwell. La mère de Kenny. De la House Arts. Il joue du piano.

Elle fit une grimace désolée, interrompant sa litanie visant à décrire son fils.

- Pardon de vous être rentré dedans.
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Sam 13 Mai 2017 - 19:46



« Some people feel the rain. Others just get wet. »
Roger Miller

Je poussais un énorme soupir, les yeux rivés sur la fenêtre. Il pleuvait, encore. D’un autre côté, ce n’était pas si étonnant, et depuis le temps que je vivais à Edimbourg, j’aurais dû le savoir. Il n’empêche, cela me déplaisait toujours autant. Quand j’étais enfant, j’avais interdiction de sortir quand il pleuvait, à moins de porter tout un tas de pulls et un anorak par-dessus, en plus du parapluie et de bottes en caoutchouc. Les médecins avaient été très clairs : au moindre petit frimas, je pouvais passer du simple rhume à une pneumonie sévère. C’était ça de naître avec des bronches en carton : elles ne supportaient pas la moindre humidité.

Heureusement, le temps hivernal était passé, et l’air n’était plus aussi froid qu’il y a quelques mois, c’’était toujours ça. Pour autant, j’allais me chercher une grosse couverture pour m’emmitoufler dedans, me laissant choir sur le canapé avec un paquet de chips et une théière à côté de moi, profitant du calme pour imaginer de nouvelles mélodies. Petit à petit, mon appartement se remplit de couleurs, d’odeurs, de sensations et surtout de musique. Cela avait beau n’être que dans ma tête, c’était ainsi que je travaillais le mieux : quand j’étais dans mon propre monde.

Un bruit sourd me ramena cependant d’un seul coup à la réalité, et je me retrouvais nez-à-nez avec une petite boule de poils rousse. Liszt se tenait sur la table basse, à côté de lui, sa boîte à biscuit métallique. Vide. Comme pour être sûr que j’étais bien conscient, il poussa la boîte dans ma direction, et le message était assez clair. Pour un écureuil, il était sacrément intelligent. Ou peut-être que tous les écureuils étaient comme ça, mais je n’en connaissais un, alors, je ne pouvais juger que d’après lui.

Et ce que je savais aussi, c’était qu’il pouvait se montrer très têtu, surtout quand j’avais oublié de lui acheter ses cookies préférés. Mon regard passa de lui à la fenêtre, derrière laquelle il continuait de pleuvoir aussi fort, et je fis une légère moue.

"Bon… Mais c’est vraiment parce que c’est pour toi."

Rassemblant le peu d’énergie que j’avais, je me levais, et commençais à m’habiller, sans que le cœur ou la motivation y soit. Une fois mon immonde anorak jaune et les bottes assorties mis, je laissais Liszt entrer dans l’une des énormes poches du manteau, et tentais de me motiver au mieux pour pousser la porte de l’entrée et sortir de mon petit nid douillet.

Je le regrettais d’autant plus lorsque j’arrivais devant la porte du magasin, close. Vacances des propriétaires. Fatum de mes deux. Je jetais à Liszt, et soupirais encore plus profondément. Où est-ce que j’allais bien pouvoir aller ? J’avais l’habitude de CE magasin, placé assez idéalement, pas trop loin de chez moi et dans une rue remplies de snacks et autres restaurants. Même si d’ordinaire, je me faisais tout livrer à domicile, la sortie pour acheter ces fameux biscuits étaient aussi l’occasion d’aller faire un tour dans ces petits bouibouis et m’acheter une cargaison de nourriture pour mieux retourner m’enfermer chez moi.

Mais là, il me fallait trouver des biscuits à la noisette. Où diable allais-je pouvoir trouver ça, alors que ma connaissance des magasins se limitait à ce qui était nécessaire pour ma survie d’asocial ? Alors que j’errais, tel une âme en peine à la dérive sous le déluge, je regardais dans les différentes vitrines, espérant y voir quelque chose qui ressemblait à des biscuits contenant de la noisette. D’un côté, je ne pouvais pas me plaindre d’avoir un écureuil compliqué, l’étant moi-même tout autant.

Le choc avec une autre personne fut d’autant plus violent qu’inattendu, et j’en perdis presque l’équilibre tandis que Liszt couinait de protestation. Mais le plus surprenant, ce fut de voir que l’autre maladroit semblait me reconnaître. Malgré la capuche qui enserrait ma tête comme un sac plastique. Mais, de mon côté, et avec mon incapacité à me rappeler du visage des gens, ce d’autant que j’en croisais beaucoup. Beaucoup trop, mais c’était comme ça. Est-ce que je la connaissais d’un orchestre ? D’une soirée ? De la PH ? Cette dernière option sembla la bonne, puisqu’elle finit par se présenter, et à me parler de son fils, Kenny. La lumière se fit petit à petit dans mon esprit.

"Ah oui, Kenny Maxwell. Piano…" Quelques secondes s’écoulèrent encore, le temps que mes neurones ne reconnectent à nouveau. Oui, je voyais très bien. Un jeune garçon, au teint semblable à la femme qui me faisait face. Je tendis une main dans un geste peu assuré. "Euh, bonjour. Et, ce n’est pas grave, je crois que tout va bien…"

Un peu perdu, je remarquais alors l’énorme assortiment de cookies du café. Mon regard se fixa dessus durant quelques secondes, et je me retournais vers la dénommée Holli

"Vous croyez qu’ils en ont aux noisettes ? Et je ne dirais pas non à une boisson chaude…"

Je parlais tout haut, mais, dans l’état où je me trouvais, c’était tout ce dont j’étais capable. Et rester sous la pluie n’aidait certainement pas.
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Jeu 18 Mai 2017 - 23:10
De fait, McGregor n'avait pas paru la remettre de suite. Pas si étonnant. Ses frasques et son caractère étaient plus connus des élèves ou professeurs de la House Mechanic, ceux qui l'avaient vus jongler avec des tournevis ou bien se mettre à cracher du feu en pleine intervention, mais aussi se baisser pour ramasser une vis et se beigner le museau dans l'établis et lâcher une bordée de jurons inventive. Pour les autres, elle était la maman du discret Kenny, et ne paraissait pas plus extravertie que son garçon.

Ash ne s'était pas présentée aux quelques élèves qu'elle avait eux comme Holli Maxwell, pour ne pas que l'on fasse le lien avec Kenny. Histoire d'éviter de trop lui foutre la honte. Au début de l'adolescence, avoir une mère qui traîne dans les parages, surtout une qui enchaîne les conneries, c'est pas forcément le souhait de tout le monde.

Le musicien face à elle lui tendit à son tour une menotte peu assurée. Mais la métisse brisa les quelques centimètres qui séparaient les deux paumes, et la lui serra, avec la vigueur que lui donnait sa bonne humeur, alors que lui assurait qu'à priori, il n'avait rien de cassé. Ça n'était peut-être plus valable : ses phalanges venaient après tout d'être quelque peu malmenées par une poignée de main de magnitude 5 sur l'échelle de Richter.

Les yeux bruns suivirent bientôt ceux de son interlocuteur, et la collection de pâtisserie du café réveilla en sursaut son estomac, qui se mit à rappeler bruyamment son existence. Un magnifique borborygme retentit dans le silence urbain, heureusement à moitié couvert par une voiture qui passait par là, projetant une gerbe d'eau après avoir roulé dans une flaque. Les dernière gouttelettes arrivèrent bien trop près de la jeune femme, qui jeta un regard noir à l'automobiliste, déjà loin.


- Aux noisettes..? Des cookies, vous voulez dire? Oh, probablement. Attendez, bougez pas, je vais demander.

L'Holli Détrempée (monstre de niveau 3) ouvrit toute grande la porte du café, et se précipita à l'intérieur d'un bon bas, laissant derrière elle une traînée de gouttes d'eau. Elle happa une serveuse au passage et désignant les gâteaux, posa la question fatidique. Après une réponse affirmative bien que quelque peu surprise, la jeune maman passa une tête bouclée débarrassée de sa capuche par l'encadrement de la porte et fit un sourire plein d'entrain. Sa main apparut à son tour, faisant signe au jeune homme d'approcher.


- Ils ont! Allez, venez, j'vous offre un truc à boire pour me faire pardonner. Ça vous remettra d'aplomb!

La brunette avait beau aimer la pluie, rester trempée dessous ne l'attirait pas plus que ça. Les douches sauvages, en soi, elle n'était pas contre, mais disons que le contexte et la compagnie participaient aussi. Elle se laissa tomber sur une banquette qui donnait sur la rue, comme pour vérifier que McGregor rentrait bien, lui aussi. Il avait l'air d'un chiot piteux, sous la pluie, et la jeune femme se sentait - il fallait bien l'avouer- un peu coupable de l'avoir pris pour un quarterback. Et puis, Holli aimait rencontrer des gens. C'était toujours une expérience enrichissante, même si la personne en face était un crétin fini. Peu de chance que ça soit le cas de l'intervenant, ceci dit. Kenny l'aimait bien, et la métisse avait tendance à faire confiance au jugement de son fils, bien plus qu'au sien, à vrai dire.

En sus, elle était curieuse. Pourquoi les noisettes?
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Sam 3 Juin 2017 - 22:22
La poignée fut franche, et beaucoup plus forte que ce à quoi je m’étais attendu. Ceci était sans doute accentué par le fait que mes propres doigts étaient à l’image du reste de mon corps : fins et délicats. Je fis de mon mieux pour cacher la légère grimace de douleur, heureusement, la capuche de mon anorak y contribuait en partie. Au moins, maintenant, j’étais certain de ne jamais oublier cette femme. Et puis, plus les secondes passaient, plus je parvenais à resituer son fils. Un petit garçon discret, mais sérieux et non dénué de talent. Il me semblait d’ailleurs que sa poignée de main était aussi froide que celle de sa mère était enflammée, mais c’était sans doute un sujet à ne pas ramener sur le tapis. Moi-même, je n’avais pas toujours bien vécu les comparaisons familiales, aussi pouvais-je supposer qu’il en allait de même chez les autres.

Je revins à des considérations plus immédiates lorsque mon regard se posa sur les cookies entreposés dans la vitrine du café à côté de nous. Ma réflexion fut suivie par un étrange gargouillement, puis une giclée d’eau, qui me rendirent confus durant quelques secondes. Heureusement, Madame -Mademoiselle ? Miss ? Je ne savais jamais- Maxwell sembla être dotée d’une meilleure attention, se dépêchant d’aller demander à l’intérieur s’ils avaient les précieux biscuits que Liszt réclamait. J’eus à peine le temps de bredouiller des remerciements, la suivant du regard à l’intérieur du café et à travers la vitre parsemée de gouttes d’eau. La première image qui me vint à l’esprit fut celle que j’avais vu un jour à la télévision d’une tornade qui s’engouffrait dans un magasin. C’était un peu la même chose, sauf que la femme ne détruisit pas tout sur son passage.

Perplexe, je la regardais interagir avec une serveuse, avant qu’elle ne revienne vers l’entrée pour me faire signe d’entrer. J’hésitais un instant à entrer à mon tour, baissant le regard vers ma poche. L’agitation de Liszt, puis les réclamations de mon estomac finirent de me convaincre. Mais ne parvinrent pas vraiment à me rassurer. Ce n’était pas tant Madame Maxwell qui m’effrayait, pas vraiment. Mais plutôt… la perspective de me retrouver face à elle autours d’une boisson chaude. Elle finirait pas découvrir que je n’étais pas un type très loquace, ou pire, très intéressant.

Mais pour l’heure, je tâchais de mettre de côté ces pensées pour me concentrer sur une chose à la fois. Aussi à l’aise qu’un goéland à terre, je m’installais en face de la métisse, et entrepris de me débarrasser de mon attirail anti-pluie, non sans peine. Une fois mon corps enfin extrait de l’anorak, et miraculeusement assez sec en dehors de quelques mèches de cheveux, je déposais ce dernier sur le dossier de la chaise avec beaucoup de soin. Une petite tête rousse poppa alors d’une poche, fixant avec curiosité la jeune femme qui me faisait face. Je l’enfonçais du mieux que je pus au fond de la poche, me doutant que les animaux n’étaient pas forcément les bienvenus dans l’établissement.

"La raison pour laquelle il me fallait ces cookies." soupirai-je à l’attention de mon interlocutrice. "Il est très difficile, question nourriture. J'espère que vous n'avez pas peur des rongeurs. Ou en êtes allergique..."

Est-ce qu'on pouvait être allergique aux écureuils ? Je devrais me renseigner tiens. Lorsque la serveuse vint prendre notre commande, je lui demandais tout son stock, avant de passer à ma propre commande, lorsque Madame Maxwell eut demandé ce qu’elle souhaitait.

"Je voudrais… un morceau de tarte aux pommes, un muffin aux myrtilles, un fudge, un carré de brownie, des scones avec de la confiture. Et un thé, s’il vous plaît." Ignorant le regard ébahi de la serveuse, je me retournais vers la femme en face de moi, et ajoutai au bout d’un moment. "Vous avez dit que vous m’offriez la boisson, je paierai le reste de ma poche, bien sûr… Enfin, je peux aussi tout payer, ça ne me dérange pas…"

Elle ne devait pas savoir, pour mon énorme appétit. Il fallait dire que je ne pensais pas qu’être surnommé le gouffre sans fond soit quelque chose qu’on puisse dire dans des conversations civilisées. Non ? Et puis, en matière d’addition, j’étais toujours perdu sur qui devait payer quoi. L’homme ? La femme ? Les deux équitablement ? Mais si je commandais beaucoup plus, qu’est-ce qui était équitable ? Mieux valait que je ne me perde pas maintenant dans ce genre de débats intérieurs.

"Alors, Madame Maxwell…" repris-je en me triturant les mains, cherchant un sujet intelligent de conversation. "Vous aussi, vous aimez les cookies aux noisettes ?"

Mouais, pas terrible.
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Mer 19 Juil 2017 - 22:40
Holli s’était installée sur une banquette avec vue sur la rue, d’où elle pourrait continuer à regarder les gouttes d’eau dessiner des motifs aléatoires sur la vitre. Elle se délesta de sa veste imbibée d’eau et la suspendit devant un radiateur qui par un heureux coup du sort se trouvait à proximité. Son tee-shirt délavé déformait avec une inventivité somme toute relative la devise londonienne, la transformant en un circonspect « Keep calm & avoid zombies » agrémenté d’un symbole biohazard vert fluo. L’objet était un cadeau d’une amie aujourd’hui perdue de vue, qui avait trouvé ça hilarant à l’époque. Holli quand à elle s’était toujours dit que le jour ou les zombies deviendraient un problème réel, le tee-shirt aurait tout de l’uniforme et plus simplement de la blague… En attendant, elle le portait tout de même régulièrement : il n’était pas plus idiot qu’un autre dans sa garde-robe dépareillée et digne d’une ado…

La brunette secoua la tête comme un chien s’ébroue et fit tomber quelques gouttelettes d’eau sur la table, qu’elle essuya –étala- d’un revers d’avant-bras, tandis que Mr McGregor s’installait devant elle… un peu piteusement. Le jeune homme n’avait clairement pas à l’aise, mais la jeune maman n’avait pas tout à fait assez d’empathie pour se demander si elle était la cause de ce malaise latent, ou s’il n’aimait tout simplement pas sortir dans le monde réel. Il lui semblait se rappeler que Kenny lui avait mentionné que son professeur avait tendance à être un peu… dans son monde ? Etait-ce ça qu’il avait dit ? D’un coup, elle ne savait plus. Boh, aucune importance.

Lorsque qu’une tête toute poilue émergea d’une des poches de l’anorak, Holli commença un cri d’admiration qui se transforma bien vite en piaillement étouffé lorsque son propriétaire la rangea du mieux qu’il pouvait au fond d’une poche : un écriteau annonçait effectivement que les chiens n’étaient pas autorisés… mais qu’en étaient-il des écureuils ? Une faille à exploiter, peut-être ?


- Il est trop mignon !

Elle fut presque discrète, se contentant de s’extasier à voix basse.

- Je savais pas que les écureuils, ça pouvait s’apprivoiser…

La jeune femme s’interrompit cependant lorsque la serveuse arriva pour leur commande. Elle hésita à peu près un quart de seconde avant de commander un caramel macchiato tout à fait décadent avec sa garniture de crème fouettée et d’amandes effilées, ainsi qu’une part de brownie. McGregor suivit, et Holli ne put s’empêcher de rire de bon cœur en entendant sa commande gargantuesque.


- Donnez-moi votre secret ! Vous avez un métabolisme mutant, c’est ça ?

Elle ne s’embarrassa pas d’un excès de timidité et de politesse. Elle était comme ça : toujours à dire ce qu’elle pensait ou ce qui lui passait par la tête, sans vraiment se soucier de savoir si elle allait vexer quelqu’un ou mettre les pieds dans le plat. L’embarras de son vis-à-vis rapport à l’addition l’amusa aussi un peu. Elle sourit et accepta le premier marché qu’il lui proposait, consciente de ses moyens.

- Non non, j’ai dit que je vous offrais une boisson chaude, j’y tiens !

Elle sourit et passa sa main dans ses cheveux encore bien humide et s’empara d’une serviette en papier dans un de ces distributeurs vintage pour éponger ce qui pouvait l’être. Sans aucune gêne, sans s’excuser d’être qui elle était. Holli pensait pratique, et n’avait pas vraiment peur de se rendre ridicule. C’était une pitre dans l’âme, un peu loufoque, un peu à l’ouest, qui trouvait des solutions à ses problèmes au fur et à mesure qu’ils se présentaient.
D’aucuns peut-être auraient sortis un mouchoir de leur poche, ou fait un détour par les toilettes pour se rendre plus présentable. Elle, non. Pourquoi se faire chier avec des détours inutiles ?

Ce faisant, elle écouta le prof en face d’elle, qui manifestement cherchait très sympathiquement à trouver un sujet de conversation. Elle le corrigea cependant sur le « Madame », d’un très naturel :


- C’est « mademoiselle » en fait. Mais peut-être qu’ « Holli » peut suffire ?

Elle lui laissait le choix, après tout. Elle-même tutoyait assez facilement et employait avec encore moins de difficulté le prénom de ses interlocuteurs, mais au fond, elle était consciente que tout le monde n’appréciait pas forcément son franc parler ou ses familiarités… Elle sourit et reposa la serviette en papier chiffonnée sur un coin de la table, dessinant au passage un nuage et quelques gouttes de pluie sur la vitre embuée.

- Je pense que j’aime moins que votre petit compagnon… Mais c’est vrai que je suis assez gourmande, de toute manière.

Elle laissa la le sujet. Après tout, il se fichait probablement de savoir ce qu’elle mangeait le matin ou le fait qu’elle détestait le fenouil. La serveuse arrive avec les boissons et les deux brownies, ajoutant un « j’arrive tout de suite avec le reste » encore un peu ébahi. La métisse s’empara de sa boisson et trempa son doigt dans la crème fouetté avant de la goûter avec un air définitivement morfalou. Affamé, dirons-nous. Elle rajouta de la cannelle en poudre au sommet et observa son œuvre, manifestement satisfaite.

- Je suis vraiment désolée pour tout à l’heure. J’ai un peu tendance à pas regarder ou je vais… Et puis, j’avoue que je ne pensais pas qu’il y ait beaucoup de monde dans la rue sous cette pluie !

Elle rit, un peu.


- Vous savez, Kenny aime beaucoup avoir cours avec vous. Il dit que c’est grâce à vous qu’il progresse en piano. Vous enseignez depuis longtemps ?
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Lun 14 Aoû 2017 - 12:14
Malgré moi, le t-shirt de mon interlocutrice attira mon attention, tandis que j’essayais avec l’énergie du désespoir d’enlever mon attirail anti-pluie. Gardez son calme et évitez les zombies ? Je voyais bien le rapport avec la devise anglaise qui séduisait toujours de nombreux touristes, mais je ne voyais pas trop le rapport avec des morts-vivants. Peut-être une référence qui m’échappait ? Très probablement. Dans tous les cas, il était certain qu’en cas d’attaque de zombies, je ne ferais pas long feu. A l’inverse de la personne qui portait ce t-shirt, qui, elle, semblait tout à fait capable de se débrouiller, quoi qu’il arrive. Pleine d’énergie, et sûrement très inventive. Tout mon contraire, en somme.

Mais la sortie imprévue de Liszt mit un terme à mes réflexions post-apocalyptiques. J’essayai de le faire rentrer à nouveau dans la poche, sans beaucoup de succès. Et la mère de Kenny dut le remarquer, à en croire ses exclamations. Beaucoup de personnes réagissaient ainsi devant mon écureuil, je me demandais parfois pourquoi. Si j’avais eu un crapaud, un rat ou une termite apprivoisée, cela n’aurait probablement pas été pareil. Une autre grande question existentielle que j’avais choisi d’écarter, pour le salut de mes nuits sans sommeil, la mettant une nouvelle fois sur le compte des règles étranges de l’humanité.

"Je ne savais pas non plus…" répondis-je en haussant les épaules, alors que Liszt était retourné dans son antre, non sans sortir de temps à autre sa petite tête pour observer l’extérieur et la jeune femme à ma table.

Heureusement, la serveuse ne le vit pas, et nous pûmes passer commande. La longue liste de mes envies ne manqua pas, une nouvelle fois, d’interpeller la mère de Kenny. Mais, là où d’ordinaire, les gens se contentaient d’un regard surpris ou perplexe, elle explosa de rire. Et ce fut à moi d’être perplexe, pour le coup. Je n’avais jamais pu comprendre qu’avoir un si grand appétit puisse être à ce point hilarant. Mais, tout compte fait, c’était plutôt une bonne chose, non ?

"Même pas. Mon corps est simplement… comme ça." Nouvel haussement d’épaules. "Ce n’est pas vraiment un secret. Mais je doute pouvoir vous apprendre comment le faire aussi."

Et puis, je ne lui souhaitais surtout pas d’avoir un corps en carton comme le mien, déglingué de tous les côtés. Ainsi que mes difficultés sociales, en prime. Non qu’elle ait besoin de changer de corps ou d’esprit, d’ailleurs. Elle semblait très à l’aise avec le sien. Très souriante. Elle utilisa les serviettes en papier pour se sécher, et je trouvai que c’était une excellente idée. Pourquoi les autres ne l’imitaient pas ? Mystère. Dans tous les cas, cela m’évitait de passer par les toilettes, alors je l’imitai sans me poser plus de questions.

Je la remerciai d’un hochement de tête lorsqu’elle confirma qu’elle voulait m’offrir ma boisson. Je n’allais pas la contredire et risquer de contrevenir à l’une de ces fameuses règles sociales toujours un peu –voire totalement- obscures. Ce que je fis malgré moi, à en croire sa remarque sur le « Madame ». Mais comme elle ne donnait pas l’impression de s’être offusquée de mon erreur, j’en déduisis que cela n’avait pas dû être trop grave.

"Holli, alors. Et Sebastian pour moi." C’était tout de suite plus simple, comme ça. Sa remarque sur Liszt et la gourmandise me laissa songeur quelques secondes. "Nous avons un point commun tous les trois, dans ce cas."

Était-ce inapproprié de la comparer à un écureuil ? Mais la serveuse amena alors nos commandes, ne me laissant pas le temps de réfléchir plus longtemps à cette question. Le moins que l’on puisse dire, c’était qu’effectivement, Holli était tout aussi ravie que nous de voir quelque chose arriver sur la table. J’entamai mon thé, attendant que toutes mes commandes soient délivrées pour oser faire sortir Liszt. Il s’installa sur mes genoux, attrapant le premier cookie que je lui tendis et commença à le grignoter avec bonheur.

"Ce n’est pas grave. J’ai tendance à être perdu dans mes pensées, et à ne pas regarder où je vais. La faute est partagée." J’entamai ma tarte aux pommes, me sentant tout de suite un peu mieux avec quelque chose dans mon estomac. Les remarques de mon interlocutrice me surprirent un peu, mais à la réflexion, Kenny semblait effectivement apprécier les leçons de piano. Cela me rassura, autant que ça me fit plaisir. Je doutais toujours de mes capacités de professeurs, et ce genre de retours me confortait un peu dans mon boulot. "Je suis ravi de l’apprendre. C’est un bon élève surtout. Un bon professeur ne fait pas tout. Et je dirais que j’enseigne depuis… mes quatorze ans, environs. Cela faisait partie de mes tâches, quand j’étais à la PH."

Contrairement à beaucoup d’autres, je n’allais là-bas que pour les leçons de musique. Parce que c’était la meilleure école de l’arche, et la seule qui puisse me donner des cours adaptés à mon niveau avancé. Pour le reste. Je suivais mes autres leçons dans une école normale. Pour essayer de me sociabiliser et de ne pas m’enfermer dans mon monde encore plus. Et il était vrai que cette scolarité un peu particulière m’avait ouvert davantage.

"Vous en voulez un bout ?" demandai-je, la bouche à moitié pleine de tarte, en montrant mon brownie. Puis, enchaînant sur un tout autre sujet : "Le père de Kenny était aussi un musicien ? Ou vous peut-être ?"
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Ven 1 Sep 2017 - 23:29
Le professeur de musique eut l'air assez perplexe lorsqu'Ash éclata de rire suite à sa commande proprement gargantuesque. Pas si étonnant : Holli était globalement quelqu'un qui vivait dans une bonne humeur constante pour peu que rien ne vienne foutre en l'air sa journée, et certaines personnes ne s'attendaient pas à autant d'énergie et de joie perpétuelle. Qui pourrait les blâmer? Après tout, la jeune femme elle-même savait pertinemment qu'elle avait changé depuis la naissance de Kenny. Il était son petit miracle. Elle avait passé toute son adolescence dans un état de colère permanent, haïssant tout et tout le monde, grognant au moindre évènement, peu importait sa nature. Elle avait été violente, et mauvaise, parce qu'incomprise, du moins à ce qui lui semblait. Si sa vie n'avait pas basculé, cette nuit-là, à la bijouterie, qui sait ce qu'elle serait devenue actuellement. Droguée au fond d'un caniveau, se vidant de son sang sur le sol en marbre d'une banque après un casse qui avait mal tourné, pauvre et misérable, pestant contre le monde et noyant sa colère dans une bouteille de scotch? Les scénarios qui lui venaient en tête étaient nombreux, mais peu reluisants.

Elle ne regrettait absolument pas cette vie-là. Telle était la réflexion qu'elle se fit alors qu'elle écoutait d'une oreille le constat désabusé que Mr McGregor faisait sur son métabolisme.


- Dommage. Vous auriez probablement fait fortune en vendant la formule secrète de la minceur à une industrie pharmaceutique.

Elle haussa à son tour les épaules et sourit, amusée quand son compagnon improvisé suivi son mouvement et utilisa lui aussi les serviettes en papier pour s'éponger. Elle rejeta d'une pichenette l'une d'entre elles, froissée en une boule humide, à l'autre bout de la table, essayant de marquer un but entre le distributeur de serviettes et le machin en bois compressé qui servait de porte-menu. Puis revint, l'air de rien, à son brownie, comme si tout ceci était parfaitement normal. Elle rit -de nouveau- à la remarque sur la gourmandise.


- Aucun doute que si l'Enfer existe vraiment, c'est dans le cercle réservé aux gourmands que je finirais.

Sa bonne humeur était palpable, même en parlant de son éventuelle damnation éternelle. La métisse poignarda la crème fouettée de sa boisson d'une paille en plastique et aspira une gorgée de café. Elle buvait souvent à la paille. Elle trouvait que ça mettait du fun dans n'importe quel truc à boire, et sa mère haussait régulièrement les yeux au ciel lorsqu'elle demandait une paille pour boire sa soupe, encore maintenant. Elle en profitait toujours pour faire des grimaces pas permis, ce qui faisait rire son père et son fils, mais nettement moins la maîtresse de maison. Enfin. Pas de grimaces cette fois-ci, c'était quelque chose qu'elle ne faisait pas à la première rencontre. Même elle avait ses principes.

Elle hochait doucement la tête lorsque Sebastian se mit à parler des capacités de son fils.


- Il travaille beaucoup. Il veut vraiment y arriver. Mais ça sera plus simple quand j'aurais trouvé de la place pour caser un piano dans l'appartement. Pour l'instant, à part le balcon, y'a pas masse d'espace.

Partager des morceaux de sa vie ou des problèmes de son quotidien avec des parfaits inconnus ou presque. Voilà quelque chose qui n'allait par contre par à l'encontre de ses règles de vie. Holli était... naturelle. C'était bien quelque chose qu'on pouvait lui reconnaître.

- Quatorze ans? Vous êtes genre, un prodige de la musique, du coup?

Elle avait parlé la bouche à moitié pleine, et s'excusa d'un vague pardon, avant de répondre à sa proposition:

- Oh non, ça ira avec le mien, merci. Moi? Mes dons musicaux se résument à jouer "Come As You Are" de Nirvana à la guitare. Comme à peu près tous les gens qui ont touchés une guitare dans leur vie. Non, ça lui vient plutôt de... son père, ouais.

Ses yeux s'assombrirent quelque peu, sans qu'elle ne semble s'en rendre compte, l'espace d'un instant, et elle resta silencieuse une seconde ou deux, comme plongée dans ses souvenirs.

- Il se démerdait pas mal avec une guitare ou une basse.

Soudain, elle releva la tête, son sourire revenu.

- J'adore cette chanson!

Sur les enceintes du café passait une chanson de Nina Simone qu'elle se mit doucement à fredonner, dessinant du doigt sur la vitre embuée une maison, un soleil, et un bonhomme-bâtons, faisant la démonstration de ses talents de dessinatrice qui n'avaient pas évolué depuis ses sept ans. Sa voix n'avait rien d'atroce et les notes étaient justes, mais sa prestation assez banale, finalement. Elle s'interrompit, une main sur la bouche:


- Pardon! Ça doit pas être super agréable à entendre pour un musicien!
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Jeu 14 Sep 2017 - 22:28
Mon interlocutrice me rappelait un peu Adrian. Toujours de bonne humeur et plein d’une énergie presque enfantine. Je ne doutais pas que mon manager et elle s’entendrait à merveille. Et que je serais sans doute de trop dans une telle rencontre. Ou alors, que j’allais subir de plein front deux forces de la nature, ce qui risquait très probablement de m’épuiser. Déjà qu’avec Adrian, j’avais de la peine à le suivre parfois, alors s’ils étaient deux… Enfin, pour le moment, et puisque nous avions de quoi nous sustenter, j’arrivais encore à tenir la route. Cela n’aiderait sûrement pas si je me mettais à piquer du nez ou à ne plus comprendre ce dont on parlait.

Ce qui fut un peu le cas, lorsqu’elle parla de formule secrète de minceur à vendre à prix d’or à des firmes pharmaceutiques. Je fronçais les sourcils, essayant d’analyser la chose. N’était-ce pas très vendeur de proposer un corps détraqué comme le mien, même pour perdre du poids ? Franchement, on y perdait au change.

"Est-ce que ça aurait vraiment marché ? Enfin, ce n’est pas comme si je voulais faire fortune, de toute manière…"

J’avais simplement besoin de revenus pour me nourrir et entretenir mon piano, globalement. En dehors de ça, je n’avais pas de grands besoins. Et je me voyais mal mettre de côté de l’argent pour un futur que je n’étais pas certain de voir. Enfin, ce n’était clairement pas un sujet à aborder avec une personne que l’on venait de rencontrer, sans doute. Et la mère d’un élève, de surcroît. Et puis, ma présence ne semblait pas entacher sa bonne humeur, ce qui était toujours bien. Elle parlait des cercles de l’Enfer comme si c’était quelque chose d’amusant, et cela ne devait donc pas être pris au premier degré. Enfin, je supposais.

"Fange puante." Après un silence, je me rendis compte que je devais sans doute ajouter une explication : "Selon Dante, ceux qui finissent dans le cercle de la Gourmandise sont enfoncés sous une fange puante, avec une pluie battante et sous les morsures et griffures de Cerbère. Enfin, si on croit à ce genre de choses. C’est pas ça qui va m’empêcher de manger."

Je haussais les épaules, et repris la dégustation de ma tarte. Puis, je me rappelais les conseils d’Adrian : la religion n’était jamais un bon sujet de conversation. Trop risqué. Est-ce que je venais de commettre un impair ? De toute façon, je supposais que c’était trop tard désormais. Et à mon soulagement, on en vint à parler de son fils et de la musique, ce qui était déjà plus dans mes cordes. Plus ou moins.

"Il a les moyens d’y parvenir. S’il continue à travailler comme il le fait." Ce n’était pas une flatterie, chose que j’étais incapable de faire. Mais un simple constat que je faisais, tout à fait professionnel. La suite de ses paroles me laissa quelques instants songeur. "Je crois que la House Mechanics a inventé un piano pliable. Ce n’est clairement pas un son de piano de concert, mais ça pourrait vous dépanner… Vous pourriez leur demander ?"

Pour mon propre parcours, je me contentais une nouvelle fois d’hausser les épaules. Je ne faisais pas grand fi de mon cas, cela parlait rarement aux gens.

"On peut dire ça. Il me faut bien des qualités, paraît-il."

Encore que, cela pouvait encore porter à débat. On apprécie le talent, mais on le distingue rarement de la personnalité. Et la mienne n’était pas vraiment des plus agréables. J’essayais de compenser, en proposant de partager un peu de mon brownie. Ou en suggérant qu’elle pouvait avoir des talents musicaux, ce qui expliquerait l’intérêt de son fils à ce sujet. Raté, pour les deux coups.

"C’est toujours mieux que rien."

Nouvel haussement d’épaules. Puis, je remarquais son regard lorsqu’elle parla du père de Kenny. Quelque chose de bizarre. Peut-être un sujet tabou. Je ne parvenais pas à me rappeler si le garçon avait mentionné sa situation. C’était typiquement le genre de détails que je ne retenais pas vraiment. Et je m’en voulus, car pour le coup, je sus vraiment que j’avais mis les pieds dans le plat. J’hésitais à m’excuser, ce qui pouvait potentiellement la forcer à aborder des choses qu’elle ne voudrait pas, ou à ne rien dire, mais faire ainsi preuve d’impolitesse.

Heureusement, son changement abrupt de sujet me décontenança assez pour me faire oublier cet incident, le temps de comprendre de quoi elle me parlait. Je finis par faire le lien, lorsqu’elle commença à chanter avec la musique qui était diffusée dans le café. A la fois fasciné et intrigué, je l’écoutais, avant de secouer la tête face à sa remarque.

"Non, ça allait. Et puis, je suis plus Classique que Jazz-Blues, même si le répertoire de ce dernier est assez intéressant au niveau des rythmes. Mais je vous en prie, continuez. Vous aimez ce genre de musique, Holli ?"

C’était mieux de l’appeler par son prénom, n’était-ce pas ce qu’elle m’avait dit ?
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Sam 23 Sep 2017 - 0:42
Holli sentait bien que sur le coup de la formule minceur, son interlocuteur ne la suivait pas. Son froncement de sourcils était déjà une indication majeure, et s'il avait fallu plus d'indices, son doute flagrant sur l'utilité d'une telle formule achevait de faire le boulot. Ça n'était pas bien grave. Ash avait 30 idées pourries à l'heure, de la formule secrète du poids idéal au grille-pain chantant. Des projets plus ou moins réalisables, souvent tous plus farfelus les uns que les autres. Et qui, dernière caractéristique commune, ne voyaient jamais le jour. Il faut dire que la jeune maman avait plus de projets que de chaussettes orphelines, et rarement le temps d'y consacrer du temps ou de l'énergie. Ça n'était finalement pas bien grave, son carnet à idée se remplissait, et un jour, peut-être qu'elle trouverait le moyen de se mettre une bonne fois pour toute à ses inventions foireuses.

Elle enfourna une bouchée de brownie, tout en se disant qu'elle n'avait pas eu sa cigarette, encore, puisque la précédente avait été vaincue en duel roublard contre la pluie. Enfin, elle doutait fortement qu'on puisse allumer une clope dans un café, de nos jours. Etrangement, la politique actuelle voulait plus qu'on garde son cancer pour soi, plutôt que de le diffuser dans la joie et la bonne humeur... Tout à ses réflexions (de) fumeuses, la jeune femme leva un sourcil pour le moins étonné lorsque les mots "fange puante" furent prononcés. Pas pour dire, mais elle ne voyait absolument pas le rapport avec le reste de la discussion. Sebastian dut s'en rendre compte, puisqu'il lui apporta quelques précisions, sur le cercle de l'enfer dédié à la gourmandise. La jeune femme fit une grimace dégoûtée : elle n'avait manifestement jamais entendu parler de ça


- Et ben, ça avait l'air d'être un sacré emmerdeur, ce Dante. Voyez, c'est pour ça que je me tiens éloignée de la religion sous toutes ses formes. Ils savent pas profiter de la vie.

Avait-elle conscience de bafouer une des œuvres majeures de la littérature? Probablement pas. Ash n'avait jamais lu la Divine Comédie, et Dante n'était qu'un vague nom, sans doute entendu un jour en classe ou dans une émission. Et encore. Elle découpa un morceau de sa pâtisserie et la recouvrit généreusement de crème fouettée prélevée sur son café. C'était pas Dante-l'anti-fun qui allait la déprimer et la faire renoncer à la bouffe, elle non plus. Le prof embraye sur son fils, et comme d'habitude, un sourire de fierté étire ses lèvres. Qui se transforme en expression ébahie en entendant les prouesses de la House Mechanic.

- Mais c'est génial, ça! Putain, mais un piano pliable, vous imaginez?

Bien sûr qu'il imaginait, puisque c'est lui qui lui faisait découvrir le concept. Elle ne perdit pas de temps avec sa logique, et embraya:

- J'avais pensé à un piano qu'on pourrait abaisser. Genre pont-levis, voyez? Avec un synthé, des charnières, un tréteau... ça devrait être faisable, j'pense. Faudrait que je tente. Ça vaudra pas le piano de sa grand-mère, mais au moins il pourra travailler à la maison.

La jeune femme avait des étoiles dans les yeux alors qu'elle imaginait les plans du piano. Comme toujours dès qu'elle parlait d'inventions, en fait. Mais elle revint à la réalité en entendant tant de négativité.

- Hey, vous savez, j'ai jamais vu Alex Mason engager des abrutis. C'est qu'à priori vous êtes plutôt quelqu'un de bien.

Elle hausse les épaules. Et quand il lui dit que sa prestation n'était pas si affreuse, elle se fends même d'un rire. Chanter a fait disparaître les nuages dans ses yeux.

- Ouais, le jazz, le rhythm and blues, j'adore. Un bon saxo, une ligne de basse pour le groove...

Elle mime un bassiste en plein solo. Holli, de l'avenir dans la air guitar?

- J'y connais rien, en classique. Ma mère a essayé de m'apprendre le piano, quand j'étais gamine. Beethoven, c'était son préféré. Elle a jamais réussi à rien tirer de moi...

La métisse sourit franchement.

- Elle s'est rabattu sur Kenny, et elle a plus de succès avec lui.

Elle mange en silence... Pendant au moins trois secondes. Puis se tourne de nouveau vers McGregor, curieuse comme tout.

- Et du coup, pardonnez-moi, je suis une fouine, hein, mais vous faites des concerts, un peu? Ou vous êtes juste enseignant? Enfin pas que ça soit mal, hein, moi aussi je donne des cours par ci, par là.

Elle rougit un peu, un peu honteuse de sa bourde... mais sa gêne disparaît en un quart de seconde, remplacée par l'attente de la réponse.
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Ven 29 Sep 2017 - 13:33
Peut-être que cette histoire de recette minceur était l’affaire du siècle. Mais ce fut surtout une opportunité manquée, mais sans doute pas la première. Tant pis, j’allais vivre avec, et il y avait bien pire dans ma vie. Et ce n’était sans doute pas si important, puisque mon interlocutrice ne s’attarda pas davantage sur le sujet. Qu’aurait été le monde si ce dernier n’était pas composé de personnes comme moi, incapable de voir des plans révolutionnaires quand ils étaient juste sous leur nez ? Cela ferait sans doute un excellent roman de Science-Fiction.

Mais en parlant de littérature, ma remarque sur la Divine Comédie tomba un peu à plat. Comme presque toutes les idées qui me passaient par la tête, souvent hors-sujet ou peu adaptées à la situation. Mais quand on cherchait désespérément des sujets de discussion pour faire illusion d’une vie sociale plus ou moins normale, on prenait le réflexe de balancer le premier truc qui nous passait en tête. Ce qui n’était pas toujours des plus réussis, et, à la réflexion, parler de torture et de trucs puants n’étaient sans doute pas un sujet approprié lorsque l’on mangeait. Heureusement pour moi, Holli ne parut pas s’en formaliser. Et sa remarque sur Dante était assez judicieuse, à la réflexion…

"On avait pas le même sens du mot « fun » à l’époque, c’est sans doute vrai…" Je pris un morceau de ma tarte, et continuai : "Et j’ai cru comprendre que certaines personnes se raccrochent à la religion pour essayer de donner un sens à l’univers. C’est une technique comme une autre, avec ses dérives."

Je haussais les épaules. Plus athée que moi, on pouvait difficilement faire. Mais il y avait presque quelque chose de fascinant dans la religion. C’était davantage pour étudier d’un point de vue historique et anthropologique, si toutefois j’avais eu de telles aspirations. Mes parents avaient bien tentés de m’inculquer quelques préceptes religieux, entre le protestantisme et l’Aeolisme. Mais ils avaient vite arrêté en me rendant compte que ce qui les aidait eux n’avait aucun effet sur moi. Mais je ne pouvais pas leur en vouloir pour avoir choisi cette solution. Parfois, des mensonges étaient mieux que la vérité.

Discuter de Kenny et de piano était un peu plus approprié, du moins je le croyais. Et mon interlocutrice n’était pas la première à avoir un problème de place ou de budget en ce qui concernait un piano. Ce qui expliquait pourquoi des solutions se trouvaient également à sa portée, la Potential Home ayant à cœur l’intégration et l’égalité des chances. J’allais répondre très sérieusement que, oui, je pouvais très bien imaginer, en ayant même discuté avec des gens de la House Mechanics, lorsqu’elle enchaîna directement. Manifestement, elle s’y connaissait mieux que moi en bidouillage.

"On fait avec ce qu’on a. Mais vous devriez voir avec eux pour fabriquer ça. Et si vous avez besoin d’un point de vue strictement musical et professionnel, je connais un très bon fabriquant de piano qui pourrait vous aiguiller."

Un piano, ce n’était pas n’importe quel meuble non plus. Sinon, ça se saurait.

Sa remarque sur le fait que je ne pouvais pas être un idiot puisque la PH n’en embauchait pas me surprit un peu. C’était une démonstration un peu boiteuse, comme souvent lorsqu’on essayait d’en faire avec des sujets humains et donc faillibles et imprévisibles. Mais ça se tenait quand même pas mal, je devais le reconnaître.

"Abrutis, peut-être pas. Mais il me manque parfois certaines capacités… sociales ? Humaines ? Enfin, j’y travaille. Et je suppose que vous avez raison, ils n’ont pas l’air de vouloir me mettre dehors pour le moment…"

Je ne m’étais pas attendu à ce qu’Holli se mette à chanter. Je n’allais pas pencher pour un syndrome de la Tourette, mais tout de même, je n’avais pas pour habitude de me mettre à chanter d’un coup comme ça. Sans doute parce que je n’étais physiquement pas capable de chanter, aussi ironique que cela puisse paraître. Alors oui, sa performance me semblait ne pas être si mal, si on comparait à ce que je pouvais faire. Et en plus, elle avait un intérêt pour le jazz.

"On peut se compléter, alors." dis-je dans un constat que j’estimais tout à fait neutre. "Et puis, je vois assez d’enfants massacrer la Lettre à Elise pour savoir que le classique, ce n’est pas pour tout le monde. Ou pour tous les âges. Mais si votre mère a au moins su rabattre son espoir musical sur Kenny, c’est toujours ça de pris. Même si ce n’est pas si important que ça, à part pour sa fierté à elle, peut-être."

J’étais direct sans m’en rendre compte, mais cela partait d’une observation personnelle. Je voyais tellement de parents derrière leur enfant, à les pousser pour participer à des concours. Ce n’était clairement pas toujours sain. Et tout ça pour quoi ? La musique était importante, certes. Mais être ingénieur aussi, ou cuisinier, mécano…

"Vous n’avez pas une tête de fouine." répondis-je, sérieusement. "Je fais aussi quelques concerts, et il m’arrive de composer. J’essaie de devenir chef d’orchestre aussi, mais c’est assez long et compliqué…" Gérer un orchestre alors qu’on arrivait pas à se gérer soi-même, dire qu’il y avait du chemin était un euphémisme. Mais j’y croyais tout de même. Je reportai mon attention sur Holli : "Ah ? Vous donnez aussi des cours ? En quoi ?"

Finalement, j’étais un peu rassuré de trouver un autre professeur. Peut-être pourrait-elle me donner des conseils ? Elle semblait en tous cas mieux maîtriser les codes sociaux implicites que je ne comprenais pas toujours.
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Dim 22 Oct 2017 - 22:54
Se tourner vers Dieu pour trouver un sens à la vie. Holli leva les yeux au ciel dans la parfaite expression de tout son mépris pour les anti progressiste. Qu'on se tourne vers Dieu, Jesus, la Vierge et ses saints pour trouver un sens à sa vie, pourquoi pas. Chacun trouvait son bonheur ou il voulait. Pour ne pas dire ou il pouvait. Mais nier des siècles de science, des années et des années de recherches et de progrès, de découvertes, parce qu'il était écrit dans un livre, ou deux, ou trois, qu'un barbu assis sur un trone avait fait naitre le monde du neant en 7 jours... ça la dépassait totalement. Et pire, ça la foutait en rogne. On ne pouvait pas douter du Big Bang, ou du fait que la Terre soit ronde. Ou du fait que l'homme descende du singe, qui lui venait d'un amas de cellule qui un jour était apparu dans la grande soupe originelle. "Tu es poussière et tu retourneras à la poussière"... alors autant, la métisse adhérait à la 2nde partie, autant l'homme façonné de poussière et la femme née d'une côte... bullshit de superstitieux.

De quoi parlaient-ils, déja?

Ash mit fin à ses divagations (momentanément, hélas) pour hocher la tête avec enthousiasme quand McGregor lui proposa de la mettre en relation avec un accordeur. Bien volontiers. Ça ferait une sacré surprise à Kenny.

Elle rencherit :


- Restez donc qui vous êtes. Pour moi, vous manquez de rien du tout.

Elle lui sourit avec simplicité. Elle avait beaucoup d'indulgence pour le manque de qualités sociales. Probablement parce qu'elle l'était trop, sociable. Elle en avait bien assez pour deux. Elle eut un petit rire quand il parla de la Lettre à Élise.

- Je fais partie de ceux qui ont participé à son assassinat. Navrée.

Navrée, elle ne l'était pas vraiment. Son sourire amusé clamait en effet le contraire. Ou du moins, que la chose ne l'avait pas particulièrement marqué. Elle se souvenait avec horreur des heures passées sur ce foutu siège recouvert de velours bleu un peu usé, à se faire taper sur les poignets par sa mère qui survaillait sa posture comme un tyran surveille l'avancement de sa Merveille. Amy Lynn Maxwell avait décidé que sa fille serait pianiste, et il lui paraissait inconcevable que celle-ci puisse ne pas être d'accord.
Mais la mauvaise volonté d'Holli et son application à être d'autant plus mauvaise que ça pourrait peut-être lui éviter cette corvée dans le futur aurait pu venir à bout de n'importe quelle obstination. Et sa mère finit par craquer, comme n'importe qui.

La jeune maman aimait sa manière de réfléchir. La fierté que sa mère avait envers Kenny ne regardait qu'elle et elle n'aurait pas dû transposer ses rêves de gloire avortés sur son petit-fils. Ash lui demandait d'ailleurs régulièrement de lui foutre la paix. De le laisser aller à son rythme. Mais Amy Lynn répondait systématiquement que ne rien faire de ses capacités, c'était un vrai gâchis. Référence certaine à sa fille qui avait abandonné les études dès qu'elle avait pu, pour une vie de criminelle. Heureusement pour le môme, il ne vivait pas avec sa grand-mère et ne subissait donc ses "encouragements" intrusifs qu'à petite dose. Pas plus mal.

Holli eut un rire quand Sebastian lui dit, le plus sérieusement du monde, qu'elle ne ressemblait pas à une fouine. Etrangement, elle doutqit que ça soit du second degré.


- Merci.

Une pause.

- Ça doit être passionnant de diriger un orchestre. Il y a des études pour ça?

Tout cela était fort éloigné de son propre milieu, fait d'étincelles, de gants de chantier, de sueur au front et de bleu de travail. Elle sourit, une fois de plus

- De la mécanique de précision, surtout. Quelques ateliers à la PH, rien de trop chronophage. Je suis métallurgiste, en fait.

S'imaginer ce petit bout de femme en bleu de travail, manipulant des plaques de métal plus grosses qu'elle pouvait avoir de quoi faire sourire. Ses collègues, tous dotés d'une musculature importante et d'une pilosité proportionnelle (la brunette s'était d'ailleurs plusieurs fois demandé si les deux étaient liés), avaient ri, en tous cas. Mais elle avait gagné leur respect de par sa capacité à réaliser les pièces les plus fines grâce à son don. Un équilibre était né : à eux les grosses pièces, à elle la précision. Et ils avaient fini par l'accepter comme une des leur, ne souriant plus lorsqu'ele enfilait son bleu et baissait ses lunettes de protection avec un air concentré.
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Lun 30 Oct 2017 - 21:12
C'était assez étrange de constater qu'une conversation pouvait très bien se passer. Sans qu'il y ait de silences gênés, ou d'immenses bourdes de ma part. Quoique, cela pouvait encore venir et je ne comptais pas me reposer sur mes lauriers. Venant de moi, tout pouvait encore arriver. C'était un effort constant pour déjà, me concentrer sur ce qui se disait, mais également pour analyser le moindre de mes gestes afin de les passer au filtre anti-trucs bizarres qu'on ne devrait pas dire en société quand on est une personne normale". Et, faute d'être beaucoup utilisé, ce filtre n'était clairement pas parfait. Heureusement, mon interlocutrice ne semblait pas en être dérangée. Au contraire, et, je pouvais me tromper mais, j'avais l'impression qu'elle n'était pas du genre à m'en ternir rigueur.

Je n'espérais pas en tous cas, car il serait extrêmement gênant de continuer à enseigner à son fils si nous terminions cette rencontre sur un cafouillage quelconque. Peut-être même que ça pourrait me faire virer de mon travail ? A partir de quand estimait-on que la situation était trop embarrassante ? C'était typiquement le genre de choses que je pouvais rater, comme la fois où j'avais dit à une flûtiste qu'elle avait acheté une robe trop petite pour sa stature et que cela risquait de nuir à sa performance ainsi qu'à son souffle. Je ne voulais juste pas me retrouver avec un membre de l'orchestre évanoui sur les bras au milieu d'une performance, mais on m'avait reproché d'avoir été trop direct et de ne pas avoir pris de gants. Ce que je n'avais pas compris tout de suite, puisque je portais effectivement des gants ce jour-là.

La remarque d'Holli me surprit d'autant plus qu'elle disait que j'étais très bien comme j'étais. Fronçant les sourcils, je la fixais plus intensément, cherchant à savoir si c'était de l'ironie. Mais non apparemment pas. Et pour être honnête, je ne sus pas trop quoi répondre.

"Vous êtes sûre ? Ce n'est pas pour remettre mon jugement en question, mais j'ai l'impression que la société m'encourage plutôt à être plus comme... vous. Plus communicatif et sympathique." Après quelques secondes de réflexion, il me vint l'idée que cela avait en fait été une sorte de compliment de sa part. Aussi, je m'empressai d'ajouter : "Mais, merci de le penser."

Apprendre qu'elle avait fait partie de ces élèves massacrant les classiques du piano me laissa pensif. Est-ce que je venais de l'insulter, indirectement ? Je n'en avais pas l'impression. Ce n'avait pas été une critique, juste un constat. Et si critique il y avait, elle était davantage tournée vers ces parents qui forçaient leurs enfants à performer comme des bêtes de foire. Je ne voyais pas non plus comment j'aurais pu mal le prendre.

"Je suis plutôt désolé pour vous. Cela n'a pas dû être évident..." Comme pour moi lorsqu'on avait essayé de me forcer à jouer au football quand j'étais enfant. Une vraie torture, et je n'avais jamais compris l'intérêt de courir derrière un ballon. Le tennis était un sport bien plus subtile et intéressant à mon sens, du moins à regarder. "Et puis, Beethoven est mort depuis longtemps, il ne vous en tiendra pas rigueur. Ce n'était même pas à Elise qu'il dédiait cette musique, alors au point où on en est..."

C'était ça d'avoir une écriture de cochon, la postérité ne gardait que ce qui l'arrangeait. Enfin bref. Le plus important, c'était que Kenny apprécie de jouer, et que sa mère n'y soit plus obligée. Tout le monde était content comme ça, non ?

Je notais que les remarques sur les fouines pouvaient être drôles. Mais souvent, je semblais faire des blagues sans même le réaliser. Adrian disait souvent que je pouvais monter un one-man show et que je ferais salle combe tous les soirs. Mais cela me semblait risquer de toute miser sur le fait que je ne comprenais pas ce que je faisais, Et, lui avais-je rétorqué, je faisais déjà salle comble pour mes concerts de piano. Ce qui ne l'empêchait pas de ressortir le sujet, comme un running gag qu'il disait. Encore un concept étrange. En quoi une blague pouvait-elle courir ?

"Y a pas de quoi." répondis-je, à nouveau très sincèrement. Puis, heureux de repartir sur un sujet que je connaissais mieux : "Oui, en complément d'études musicales de base. Mais ça demande surtout beaucoup de pratique. Et de se faire un nom dans le milieu."

Le travail pratique semblait aussi être important dans le métier de mon interlocutrice. La mécanique. Vraiment un domaine totalement étranger pour moi. Je savais à peine changer les piles de mon réveil, alors faire plus, je n'y pensais même pas... Cela me rendait d'autant plus admiratif.

"Oh, vous créez des choses alors ? En métal ?" Selon la définition de métallurgie, j'étais assez sûr de mon coup. Enfin, presque. Et puis, de ce que j'avais pu voir à la Potential Home, c'était parfois impressionnant. Je cherchais un exemple d'objets métalliques que je puisse prendre en exemple, mais force était de constater que je n'avais pas beaucoup d'idées. A part bien sûr : "Vous avez déjà travaillé sur une structure de piano ? C'est très précis, et j'en ai un chez moi."

On se rattrapait à ce qu'on pouvait. La tête de Liszt sortit à nouveau de ma poche et je lui tendis distraitement un morceau de cookies. Une pensée me traversa alors l'esprit.

"Euh, je ne sais pas si c'est dans vos cordes, mais... vous sauriez fabriquer un petit charriot ?" Là encore des précisions s'imposaient, réalisais-je après coup. "Liszt aime beaucoup sortir se promener, et quand on va chez mes parents, il adore se faire balader dans une charrette. Je me disais que, peut-être, quelque chose de plus robuste et adapté à sa taille serait mieux..."
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Sam 17 Mar 2018 - 1:37
La brunette haussa les épaules, sa paille coincée entre les dents alors qu’elle terminait un peu bruyamment son café, comme une gosse cherche à aspirer la dernière goutte de son coca, le seul qu’on lui autorise parce que c’est dimanche et qu’il y a des invités. Parce que le coca, c’est mauvais pour les dents, et puis ça fait grossir. Avec un air tout à fait sérieux, elle pointa un doigt – malpolie qu’elle était- dans la direction de Sebastian.

- Vous savez quoi ? La société, vous l’emmerdez. A quoi ça sert de robotiser les gens pour en faire des copies hein ? Alors quoi, z’êtes pas très loquace, pas forcément à l’aise avec les gens. Qu’est-ce qu’on s’en fout, hein ? Ça vous définit par pour autant, et j’suis sûre que vous avez d’autres qualités.

Elle se rejette dans le fond de son siège, nonchalante. Détester tout ce qui avait trait à une systématisation ou l’envie de foutre des gens dans un moule, ça, ça l’avait jamais quitté. Son côté ado rebelle qui résistait, encore et toujours, à l’âge adulte.

- J’suis p’t’être communicative, mais j’ai un sale caractère, alors dev’nir comme moi, j’le conseille pas trop.

Sans trop y faire attention, elle avait un peu repris son accent des bas-fonds écossais, celui qu’elle avait choppé, ado, après avoir fugué pour vivre dans des squats à Muirhouse. Celui qui la faisait passer pour une petite racaille. Conséquence direct de son discours buté contre le conformisme. S’en rendait-elle compte ? Difficile à dire. Toujours est-il que lorsqu’elle changea de sujet, après un court silence, la bizarrerie auditive avait presque disparue.

- Sérieux, c’était pas pour Elise, ce morceau ? Damn, dire qu’on a fait chier des générations d’apprentis pianiste avec.

La chose semblait réellement l’amuser. L’ironie, finalement, ça tombait sur n’importe quoi et n’importe qui. Elle s’apprêtait à divaguer sur la ou le véritable destinataire de cet incontournable de la musique classique, mais se repris à temps. Probablement parce que le professeur de piano était en train de répondre à la question qu’elle venait de lui poser, et que son cerveau se dit qu’il aurait été franchement malvenu de se mettre à digresser pile à ce moment.

- Se faire un nom ? Ah ouais, j’aurais pas imaginé. Enfin, j’dois dire que je connais pas franchement le milieu de la musique. A vous écouter ça a l’air super rigoureux. Moi qui imaginait que c’était rigolade et partie de plaisir…

C’est du moins l’image que renvoyait le monde du rock et du punk (si on ajoutait refus de l’autorité et saturation des sons dans le dernier cas). Mais après tout, qu’y connaissait-elle ? Sa seule expérience de la musique consistait à quelques cours de gratouillage dans une maison abandonnée et pleine de courant d’air. Et aux quelques concerts qu’elle avait eu l’occasion de voir… Autrement dit, trois fois rien.

Heureusement, elle avait plus à dire sur son propre métier et esquissa un sourire :

- Ouais. Ça va de la carosserie de VAP à des trucs bien plus petits. J’ai jamais fait le piano, non, le plus précis c’était une locomotive miniature. Mais plus dans mon temps libre, ça, au boulot j’suis surtout fondeuse-soudeuse.

Le genre de truc qu’on ne voyait pas trop une nana faire. Surtout la partie carosserie de vaisseau. Enfin, l’atelier ou elle bossait n’était pas une grosse structure, et heureusement. Au moins, ça permettait d’avoir de la diversité dans les tâches, et pas uniquement de découper des pièces de carlingues de vaisseaux.

- Un chariot ? Pour Liszt ? Ouais, j’pense que je peux faire ça. J’peux même intégrer un distributeur de cookie et le faire radioguidé, si j’ai assez de temps.

Le projet avait l’air de la tenter, et elle se mit à griffonner une esquisse au stylo sur une serviette en papier.

- Quelque chose comme ça, avec…

Elle fut interrompue par la sonnerie de son vieux téléphone. S’excusant d’une grimace, elle attrappa l’engin du diable et y répondit.

- Ouais. Non. Merde, t’es sérieux ? Raaah nan mais c’est… okay… Okay, laisse moi une petite heure.

La conversation avait été courte. La grimace sur le visage d’Ash laissait entendre qu’il n’était pas question de quelque chose de forcément plaisant. De fait, elle s’expliqua :

- Mon boss a besoin de moi. Un client chiant veut une retouche sur un truc que j’ai fait, et les gars de l’atelier ont pas de chalumeau au bout des doigts, eux. J’vais devoir vous laisser du coup.

Attrappant sa veste encore bien humide, elle la jeta sur ses épaules et se baissa pour ajouter, sous le croquis, les quelques chiffres de son numéro de téléphone.

- Ecoutez, envoyez-moi un message ou appelez-moi pour cette histoire de chariot. On en reparle. J’suis vraiment désolée de vous planter, Sebastian, mais hé ! J’vais pas cracher sur des heures supp’. Vous m’appelez, hein ?

Quelque chose lui disait qu'il ne le ferait pas. Qu'importe, la balle était dans son camp, maintenant. Rieuse, elle laissa un billet et quelques pièces sur la table, pour payer sa part et le thé du professeur de son fils, et enveloppa ce qu’il restait du brownie –la dernière bouchée- dans une serviette. Puis avec un clin d’œil et deux doigts portés à ses tempes, elle disparut avant que la clochette de la porte d’entrée n’ait finit de résonner.
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[Sujet clos] Clouds in my coffee| McGrenouille Gifpro10
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Lun 16 Avr 2018 - 17:43
Je serais sans doute reparti dans une réflexion assez pessimiste et introspective, si Holli ne m’avait pas pointé du doigt avant de me sortir un discours prononcé avec tellement d’énergie qu’on ne pouvait que l’écouter. Surtout avec cet étrange accent qu’elle prenait. Et ce n’était pas plus mal. Je ne serais certainement pas arrivé à de telles pensées par moi-même, c’était une certitude. Alors que devant de mon interlocutrice, cela semblait assez logique, au final. Pourquoi pas emmerder la société et m’en fouttre ? Oh, ce n’était pas si facile, mais c’était toujours rassurant de voir que certains y arrivaient. Ou essayaient, en tous cas.

"J’en ai d’autres, oui." Et cette facilité pour la musique semblait plaire à quelques personnes. Les plus importantes. Cela devait être suffisant, non ? Quant au sale caractère, je savais maintenant que c’était une expression qui n’avait rien à voir avec la propreté, et qui m’évitait une erreur gênante déjà commise par le passé. J’haussai les épaules. "Je vous trouve inspirante, pourtant."

Elle n’était certainement pas comme quelqu’un d’autre, mais c’était assurément une qualité. Et savoir ce qu’on voulait, c’était une bonne chose. Je voyais ce que l’inverse avait fait chez moi, et ce n’était vraiment pas enviable. Je continuais à manger mes pâtisseries, tout en donnant de temps à autre un morceau de cookie à Liszt dans ma poche de manière distraite.

"La postérité, c’est étrange parfois…" dis-je, la bouche à moitié pleine.

A se demander ce qui allait arriver à notre nom dans plusieurs décennies. Tombé dans l’oubli, ou ressorti des abysses pour Dieu savait quelle obscure raison. Ce qui était certain, c’était que cela dépendrait sûrement de ma capacité à avancer dans le milieu et à atteindre mes objectifs. Devenir chef d’orchestre n’était pas à la portée de tous, et comme souvent, cela dépendait d’un concours de circonstances. Être au bon moment au bon endroit. Mais on pouvait aussi forcer le destin en mettant toutes les chances de son côté.

"En tous cas, dans le classique, et à un niveau professionnel, c’est le cas. D’après ce que j’ai compris, c’est également le cas dans la country, mais pour le reste, je ne peux pas me prononcer…"

Mais c’était assez parler de moi. Et le boulot de mon interlocutrice s’avérait tout aussi inconnu à mes yeux que le yodle. De ce qu’elle me disait, je pouvais supposer qu’elle soudait et faisait fondre. Et faisait des locomotives. C’était sympa, les locomotives.

"Vous devez avoir pas mal de boulot alors, vu tout ce qu’on produit aujourd’hui…" Peut-être que j’étais nostalgique d’un temps avant la révolution industrielle et que je n’avais jamais connu. Juste pour la beauté de la chose. Parce qu’avec ma condition, je n’aurais sans doute pas survécu deux semaines. Alors la modernité avait aussi du bon. En tous cas, la proposition de chariot pour mon écureuil ne sembla pas être stupide. J’hochai la tête à chaque nouvelle proposition, avant de me pencher sur le dessin qu’elle commençait sur une serviette, tandis que Liszt sortait aussi sa tête pour observer l’esquisse de son peut-être futur moyen de transport. "Ça me semble vraiment bien."

La sonnerie de son téléphone me fit légèrement sursauter. Je suivis à moitié la conversation, qui fut tout de suite plus claire lorsqu’elle m’expliqua la situation. Une urgence de boulot. Je savais ce que c’était. J’hochai donc simplement la tête, compréhensif.

"Pas de souci. Je vous recontacterai. Bonjour à Kenny. Et merci pour ce moment."

Elle fut partie si vite que je n’étais pas capable de dire si elle avait tout entendu, au vu de la lenteur avec laquelle je parlais. Je regardais toutefois la serviette, pensif. Avant de me tourner vers Liszt.

"Qu’est-ce que tu en dis ? Ça te tente ?"

L’approbation ne se fit pas attendre, et je pris donc la serviette pour la ranger précieusement. Lorsque les conventions sociales le permettraient –j’avais trouvé un guide sur le sujet, bien utile-, je la recontacterai. Pour l’heure, je terminais ma consommation, la tête pleine de mélodies vives et énergiques. L’inspiration venait sans vraiment prévenir, parfois de rencontres mystérieuses.

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